Face à la recrudescence de l'antisémitisme dans l'hexagone et dans le contexte dramatique des récentes agressions du 19ème arrondissement de Paris, la Ligue Internationale Contre le Racisme et l'Antisémitisme met en place une grande exposition qui explique le cheminement de l'idéologie de la haine, du Moyen-âge jusqu'à nos jours. Roger Benguigui, président de la fédération Rhône-Alpes qui inaugurait cette manifestation le 11 septembre dernier, fait un état des lieux du problème en France et tente de définir les solutions possibles contre les phénomènes alarmants du fatalisme et de la banalisation.
Quel bilan peut-on faire aujourd'hui de la situation de l'antisémitisme dans notre pays'
Dans les années 90, on enregistrait une moyenne de 300 cas d'antisémitisme par an en France. Depuis les années 2000, cette moyenne est passée à environ un millier de cas chaque année. Les chiffres publiés par le Ministère de l'intérieur le démontrent et les récents évènements à Paris témoignent d'un phénomène général. Voici deux exemples parmi les dizaines de plaintes courantes que nous traitons annuellement : Une enseignante a trouvé sur son bureau un billet avec les mots « ...sale juif, on va te brûler... Je vais te cramer ta grosse race de... » ; un automobiliste s'est fait traité de « sale juif » parce qu'il avait arrêté sa voiture devant son allée qui jouxte une synagogue... Aujourd'hui, dans les écoles et les collèges de France, « juif » est devenu l'insulte suprême, que l'adversaire soit juif ou pas. Ce que l'on ressent surtout aujourd'hui, c'est une banalisation de l'antisémitisme que l'on n'arrive pas à expliquer. Il y a 20 ans, si on profanait un cimetière juif, toute la France était dans la rue. Aujourd'hui, Ilan Halimi est assassiné et il n'y a eu quasiment aucune manifestation nationale. Ce ne sont pas les lois qui posent problème, au contraire. La législation anti-raciste n'a jamais été aussi ferme, les condamnations contre le négationnisme jamais aussi lourdes. Les juges font leur boulot, les députés ont fait son boulot, les juges font leur boulot, les policiers aussi... Peut-être que nous sommes en train de constater les conséquences de dix ans d'effet Le Pen. La France est dans une situation où l'incertitude ne cesse d'augmenter pour les personnes et l'histoire nous a montré que le juif est un bouc émissaire idéal dans ce type de contexte. En outre, les enquêtes qui ont été faites récemment par le Centre d'Étude des comportements enregistrent 38% des antisémites comme étant d'origine maghrébine, alors que le pourcentage de français sur ce critère tombe à 12%. Ces chiffres démontrent l'urgence et la nécessité de la mise en garde des individus et en particulier des jeunes contre les évolutions de ce phénomène, qui peuvent se révéler lourdes de périls.
Quelles sont les actions essentielles de la LICRA et comment conçoit-elle son rôle'
Notre association accueille et défend en justice les victimes de violences verbales ou physiques et de discrimination à caractère raciste et antisémite. Elle exerce sa vigilance dans les médias et les publications et sur Internet, vis-à-vis des « négationnistes » qui mettent en doute le génocide juif de la dernière guerre. Elle exerce enfin un statut consultatif spécial auprès de l'ONU et du Conseil de l'Europe. Notre action de prévention s'exprime tout d'abord dans le domaine de l'éducation, où nous intervenons dans plus de 150 classes chaque année (4500 élèves/an), dans les écoles, les collèges et les lycées de France dans le cadre d'une convention ministérielle pour l'éducation à la citoyenneté. Nous organisons aussi des formations dans les entreprises pour aider les acteurs à mieux agir et réagir face aux difficultés liées au racisme. nous oeuvrons dans le domaine du sport et dans le football en particulier contre les actes de discrimination et de violence. Enfin, nous participons au travail de mémoire au travers de conférences, de publications et d'initiatives publiques diverses. c'est ainsi que nous avons utilisé l'exposition « L'antisémitisme du Moyen-âge à nos jours » comme un instrument pédagogique au plus grand nombre, visant à remettre cette question grave sur le devant de la scène et à amener les gens à réfléchir. notre politique n'est pas celle de la dénonciation. Nous avons constaté que manifester est contre-productif et alimente la publicité recherchée par les mouvements antisémites et négationnistes. De plus, la médiatisation engendre un sentiment de fatalité et d'impunité que nous combattons en refusant de publier dans la presse les informations concernant les affaires que nous traitons. Mais ne rien faire du tout n'est pas une solution. Ce que nous cherchons à travers des outils comme cette exposition, c'est engendrer une prise de conscience dans le public qui ne sait pas ou qui a oublié les leçons de l'histoire.
La LICRA est très fortement identifiée avec la communauté juive, et les médias français questionnent ses interventions dans des domaines non liés au judaïsme...
Notre propos est celui du rassemblement de toutes les sensibilités. Ce n'est pas l'affaire d'une communauté de défendre sa communauté. C'est l'affaire de tout le monde. Ça relève de la défense des valeurs par les citoyens « lambda ». C'est une des raisons pour lesquelles le lieu actuel de l'exposition, l'église Saint Bonaventure de Lyon, prend une valeur hautement symbolique et particulièrement émouvante. Le fait que l'église catholique soit aujourd'hui du côté de ceux qui combattent l'antisémitisme témoigne de tout le travail qui a été accompli, depuis les années soixante, de revisitation du dogme chrétien du juif déicide. C'est un grand réconfort pour notre cause.
Le Cardinal Barbarin, Archevêque de Lyon, a déclaré lors de l'inauguration de l'exposition ou étaient présent des représentants juifs et musulmans: « L'antisémitisme chrétien est un péché effroyable que tous doivent combattre et qu'il ne faut surtout pas reléguer dans le passé... Il faut tenter de comprendre les mécanismes qui ont pu rendre possible la résurgence, même après la Shoah, d'un phénomène aussi atroce... La chrétienté doit oeuvrer avec le Peuple Élu »...
« L'EXPOSITION »:
Elle a été inspirée par Ernest Nives, survivant de la Shoah d'origine autrichienne, en hommage à sa mère disparue dans la nuit de Birkenau, et documentée par une équipe d'historiens néerlandais et en particulier par l'historienne Johanna Kiens Meyer de la Fondation d'Auschwitz.
Composée de dix triangles de panneaux rétro éclairés, elle intègre des documents, des images et des archives qui se déclinent sur quatre grandes périodes:
Les 8 premiers panneaux ont trait au Moyen-âge, dans une dimension européenne, présentant les différentes facettes de l'antijudaïsme (les images chrétienne des juifs, la première Croisade, les mythes antijuifs, la discrimination, les expulsions et la peste noire, les juifs de Pologne et de Lituanie).
les 10 panneaux suivants sont consacrés à l'émancipation des juifs et aux formes de l'antisémitisme (l'antisémitisme populaire et politique, l'affaire Dreyfus, les « Protocoles des Sages de Sion, les pogroms de Russie, les théories raciales des nazis, les mesures antijuives (1933-1939)).
4 panneaux traitent du génocide des juifs pendant la Seconde Guerre Mondiale (la persécution et le meurtre systématique de des juifs d'Europe, la collaboration, Vichy, les camps de la mort).
Les 8 derniers panneaux décrivent l'antisémitisme après 1945, ans une dimension internationale (en France, en Russie et en Europe de l'Est, le monde arabe, le négationnisme, la propagande haineuse sur Internet).
Cette exposition a été présentée en Russie, en Pologne et aux États-Unis. Elle a voyagé, en France, de Paris à Brest, puis à Rouen, Tours et Grenoble. Elle est prévue à Nice et à Marseille, mais aussi au Maroc où la LICRA doit ouvrir prochainement un bureau.
« LES FAITS »:
Ilan Halimi a été kidnappé le 21 janvier 2006 en région parisienne et torturé pendant les trois semaines suivantes. Découvert agonisant le 13 février 2006 le long d'une voie ferrée, il est décédé peu après lors de son transfert à l'hôpital. L'autopsie a mis en évidence des marques de lacérations et de brûlures couvrant 80% de son corps. Ses ravisseurs se faisaient eux-mêmes appeler « le gang des barbares ».
Rudy Haddad, dix-sept ans, a été agressé le samedi 21 juin 2008 dans le 19ème arrondissement parisien, alors qu'il sortait de la synagogue, par un groupe d'individus qui l'on frappé à coup de barres de fer parce qu'il portait une Kipa sur la tête. Il a subi plusieurs fractures du crâne et est demeuré plusieurs jours dans le coma.
Samedi 6 septembre 2008, Dan, David et Kevin, trois étudiants juifs âgés de 17 et 18 ans rentraient chez eux dans le 19 ème arrondissement. Les agresseurs, un groupe multiethnique, ont porté des coups violents aux jeunes hommes. Deux des victimes ont eu le nez cassé et le troisième huit points de suture à la lèvre et de nombreuses contusions.
Dans ce contexte de violences alarmantes, le journaliste Siné a tenu, dans une chronique publiée le 2 juillet 2008, des propos antisémites liés au mariage de Jean Sarkozy et à son éventuelle conversion au judaïsme, propos qu'il a réitérés à l'antenne de RTL et qui ont conduit à son renvoi de l'hebdomadaire pour lequel il écrivait. La plainte de la LICRA « pour incitation à la haine raciale », représentée par maître Alain Jakubowicz, doit être entendue à Lyon le 27 janvier 2009.
Sandrine Ben David (Jerusalem Post Edition Française ? septembre 2008)
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