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Blog : Sandrine Ben David

La forteresse rouge


L'action se situe au Sud Liban, en l'an 2000. A proximité de la forteresse médiévale du Beaufort se trouvait une base militaire du même nom. Cet observatoire massivement protégé par Tsahal avait été édifié en 1982, pendant la guerre du Liban. Il était le symbole de la politique israélienne de l'époque qui promouvait le contrôle géographique du Sud Liban, et il a porté les marques du sacrifice de centaines de jeunes soldats qui y ont perdu leur vie.

Le 24 mai 2000, les troupes militaires israéliennes se sont retirées du territoire libanais et la base du  Beaufort a été entièrement démolie, détruite par des milliers de mines. Le film relate ces événements à travers l'histoire de Liraz Liberti, dernier commandant du Beaufort, et de ses soldats pendant les dernières semaines qui ont précédé le retrait militaire, durant lesquelles Liraz, âgé alors de vingt-deux ans, préparait l'évacuation et l'anéantissement du site, détruisant ainsi tout ce que lui et ses camarades avaient sacrifié pour défendre.

Pour le réalisateur Joseph Cedar, qui a passé la plus grande partie de son service militaire obligatoire à l'intérieur de la "zone de sécurité", occupé à éviter les tirs et les embuscades du Hezbollah, la réalisation de ce film a été une véritable catharsis. "Un nombre inimaginable de scènes ressemblent à mon expérience personnelle comme à l'expérience de tout homme qui a été un jour soldat' L'idée de leur simple passage à l'écran représente dès l'abord une forme de thérapie", explique le cinéaste. "Le site du tournage est une forteresse datant de l'époque des croisades que nous avons choisie pour sa ressemblance avec le Beaufort. Mais ce film est l'histoire de toutes les montagnes et de toutes les batailles, ici ou ailleurs. Des hommes meurent au combat pour les conquérir, meurent au combat pour ales protéger, et puis un jour, ils découvrent avec amertume que rien de tout cela n'avait de sens."

Contre toute attente, la production de ce film au message plutôt dérangeant a été financée en partie par le gouvernement israélien et l'armée elle-même, qui a fourni à l'équipe du film son soutien logistique ainsi que tout le matériel d'artillerie lourde. "J'ai été surpris et touché de la manière dont les Officiels militaires qui ont travaillé avec nous ont compris l'importance de la réalisation de ce film, même si ce n'était pas une décision évidente pour eux que celle de nous apporter leur aide."

"C'est la première fois que je vois un film israélien qui traite de l'armée et de la guerre et où les soldats, ne tirent presque pas avec leurs armes", a dit un journaliste syrien en sortant de la projection du film à Berlin. L'une des qualités premières de Beaufort est celle d'un nouveau regard porté sur la guerre : plus pudique, plus objectif et peut-être plus douloureux en cela que celui auquel les spectateurs israéliens sont habitués dans ce genre cinématographique.

Le suspense du film est entièrement construit sur la tension entre les attaques successives contre le fort et les périodes de calme à l'intérieur des murs, durant lesquelles les personnages tentent de se recomposer, dans un univers totalement claustrophobe, à l'humour macabre et aux rituels hallucinés.

Le réalisateur a choisi de montrer avec beaucoup de retenue la douleur des jeunes hommes au moment de la mort brutale de leurs camarades. Il a respecté ainsi la complexité de l'homme, l'éventail des réactions humaines possibles face à la tragédie et les différentes interprétations individuelles de la situation, sans jamais prendre le parti de l'une ou de l'autre.

Malgré cette pudeur, qui s'exprime aussi par un très petit nombre de dialogues, le film n'échappe pas à certains clichés typiques du genre, comme celui, classique, où l'un des soldats fait découvrir au Public sa petite amie américaine et leurs projets de mariage, quelques secondes avant de se faire tuer par un obus.

Contrastant avec l'univers étouffant et quasi carcéral du fort militaire et avec la musique de Ishaï Adar, minimaliste, climatique, qui pénètre presque insensiblement le film et le hante de son thème angoissant, les images panoramiques majestueuses du paysage montagnard autour du bunker et le "one-take" de la formidable déflagration qui détruit le site à la fin du film sont des expériences visuelles époustouflantes.

Beaufort présente, en outre, un casting de qualité qui inclut Itay Tiran, Oshri Cohen, Itay Torgeman et Alon Abutbul, avec de belles et sincères performances d'acteurs, contre l'avis de ceux qui avaient reproché à certains d'entre eux, au moment du tournage, de ne pas avoir fait leur service militaire.

Beaufort est le troisième long métrage de Joseph Cedar. Son premier film, Hahesder (Le compromis), avel Aki Avni, Tinkerbelle, Idan Altermann et Assi Dayan dans les rôles principaux, a remporté l'Oscar 2000 de l'académie israélienne du cinéma. Son deuxième film, Medourat Ha Shevet (Feu de Camp), a obtenu la même récompense en 2004. Le tournage de Beaufort s'est achevé le 4 juin 2006, peu de temps avant le début de la deuxième guerre du Liban. Sans pouvoir prévoir le retour infernal de l'histoire sur ses pas, Joseph Cedar a tenté, à travers cette histoire, de comprendre et de faire comprendre au monde le visage absurde de la guerre, et de glorifier les mémoires de ceux qui sont peut-être morts pour rien.

Beaufort de Joseph Cedar, distribué en Israël par le groupe Globus International, en salles depuis le 6 mars 2007. Site officiel du film : http://www.bufor.co.il/peut-être morts pour rien.


Sandrine Bendavid (Jerusalem Post Edition Française, avril 2007)

Membre Juif.org





Dernière mise à jour, il y a 25 minutes