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Blog : Ragazou

Quel avenir pour les Chrétiens d'Israël et de Palestine'

 

By ELIAS LEVY, Reporter (publié sur CJN)

 

L'avenir des Chrétiens en Israël et en Palestine est des plus incertains, affirme l'écrivain, bibliste et éditeur français René Guitton, auteur de Ces Chrétiens qu'on assassine. Le livre noir de la christianophobie (Éditions Flammarion, 2009).

 

Alors qu'en Orient et dans des contrées islamiques du Maghreb, du Moyen-Orient, de l'Afrique subsaharienne'

 

les Chrétiens sont persécutés ou contraints au silence, en Israël ces derniers sont ?victimes d'une espèce d'harcèlement sournois', renchérit en entrevue ce militant pour le dialogue des cultures et des civilisations, membre du réseau d'experts de l'Alliance des Civilisations, un projet parrainé par les Nations Unies.

 

 

 

Canadian Jewish News: Combien de Chrétiens vivent en Israël'

 

René Guitton: Selon les chiffres publiés par le Bureau de Statistiques d'Israël, les Chrétiens seraient au nombre de 149600, soit 2,1% de la population israélienne. L'immense majorité, 120000 âmes, sont des Arabes israéliens, fiers de leur enracinement multiséculaire dans le pays.

 

Ils le clament bien haut et se targuent volontiers de leurs multiples appartenances: Arabes, Chrétiens de culture musulmane, de mémoire byzantine, dans un milieu juif. Ils ont choisi, pour les plus vieux d'entre eux, de demeurer sur les terres où ils vivaient au moment de la proclamation de l'indépendance d'Israël en 1948. Ils ont été relativement épargnés par les flux migratoires qui ont suivi le premier conflit israélo-arabe.

 

Jugés malléables ou peu dangereux, ils ont été autorisés à rester, même si l'on a assisté à des expulsions: certains habitants Grecs orthodoxes du Nord de la Galilée attendent toujours l'autorisation de réintégrer les deux villages dont ils sont originaires.

 

C.J.N.: L'immigration des Russes d'origine chrétienne a-t-elle chambardé la démographie des Chrétiens israéliens'

 

René Guitton: Oui. La prédominance des Catholiques Melkites est aujourd'hui battue en brèche par l'arrivée massive de ces ?Juifs' de l'ex-Union soviétique, venus grossir la population de Chrétiens Grecs orthodoxes après 1989, année de l'effondrement de l'Empire soviétique communiste.

 

C.J.N.: Ces Russes non-Juifs ont bénéficié des prérogatives accordées par la Loi du Retour.

 

René Guitton: Ces ?Juifs' russes ne sont ?Juifs' que de nom. Nombre de ces ?Juifs' soviétiques sont issus d'unions contractées hors de la Communauté juive ou ont épousé un conjoint chrétien orthodoxe. Bon nombre d'entre eux sont ethniquement Juifs, mais convertis à la religion chrétienne orthodoxe.

 

Ces Israéliens, non réellement Juifs, d'origine russe, taisent souvent leur christianité. Beaucoup choisissent de ne pas afficher leur foi chrétienne pour ne pas se dissocier de leurs concitoyens Juifs. Dans leur carte d'identité, les autorités israéliennes les ont classés comme Russes, sans mention de leur religion.

 

C.J.N.: Les Russes non-Juifs israéliens constituent-ils un bassin de population important'

 

René Guitton: Ils seraient aujourd'hui au nombre de 300000 ou 400000. Leur arrivée aurait fait basculer la balance au profit des Chrétiens orthodoxes, qui représenteraient désormais 50% des Chrétiens israéliens. Cela explique que les statistiques officielles israéliennes ne retiennent que le chiffre de 149000 Chrétiens, raisonnement talmudique qui satisfait tout le monde.

 

Grâce à cette immigration ?Juive russe', le pourcentage de Chrétiens au sein de la population israélienne a par conséquent considérablement augmenté, et serait largement supérieur aux 2,1% attestés par les statistiques officielles: certains responsables Chrétiens avancent même le taux de 8%.

 

C.J.N.: Ces Russes israéliens affichent-ils ouvertement leur identité religieuse chrétienne'

 

René Guitton: Les Chrétiens israéliens d'origine russe, numériquement importants, sont une espèce dont l'avenir reste incertain. Excepté une petite frange profondément croyante et pratiquante, ces Orthodoxes risquent fort de disparaître sous le rouleau compresseur d'une société fondée sur le nationalisme juif, auquel ils se rallient, souvent par haine du Palestinien qui conteste leur présence en Israël.

 

C.J.N.: L'identité religieuse chrétienne des Russes israéliens doit sûrement poser des problèmes à ces derniers dans un pays où les affaires civiles -mariage, divorce, naissance, enterrement'- sont régies par la Halakha, la Loi religieuse juive'

 

René Guitton: Le fait qu'ils ne soient pas Juifs selon la loi rabbinique leur interdit de contracter un mariage religieux avec une personne de religion juive. Ils s'en soucient peu. Même si le mariage civil n'existe pas en Israël, les députés du parti russophone Israël Beitenou ont obtenu pour eux un acquis appréciable: une union civile exclusivement réservée aux conjoints non-Juifs, sans appartenir à une autre confession. Quand à ceux qui vivent en concubinage avec un Juif ou une Juive, la pratique de l'union libre est si développée en Israël qu'ils n'ont guère à se soucier de l'opinion des voisins.

 

C.J.N.: Selon vous, le statut des Arabes chrétiens dans la société israélienne est assez précaire.

 

René Guitton: Bien que la majorité d'entre eux sont des citoyens israéliens protégés par cette appartenance, le plus grand danger qui menace aujourd'hui les Chrétiens arabes réside dans la tentation de l'émigration des jeunes générations, souvent bien éduquées mais qui peinent à s'insérer dans la société et le monde du travail israéliens.

 

La fonction publique israélienne offre peu de perspectives de recrutement ou d'avancement aux Arabes, et donc aux Chrétiens arabes, ce qui dissuade les jeunes Chrétiens diplômés de s'engager dans cette voie. Quant au secteur privé, il propose peu de places aux candidats Arabes.

 

C.J.N.: Les relations entre l'État d'Israël et sa minorité chrétienne sont donc tendues'

 

René Guitton: Tant que les affaires en suspens entre l'État d'Israël et l'Église catholique ne seront pas réglées, des tensions et des différends subsisteront. C'est le président Shimon Péres, dont j'ai été l'éditeur en France et qui m'honore de son amitié, qui me l'a dit lors d'une récente rencontre à Jérusalem.

 

L'Église chrétienne orthodoxe est propriétaire des terrains en bail emphytéotique -de longue durée- sur lesquels ont été édifiées la Knesset et la Grande Synagogue de Jérusalem. L'Église orthodoxe veut augmenter les loyers alors que l'État israélien veut non seulement les faire baisser, mais voudrait aussi récupérer ces terres. Cette partie de bras de fer envenime les relations entre Juifs et Chrétiens.

 

C.J.N.: D'après vous, des partis politiques israéliens ?instrumentalisent' la minorité chrétienne à des fins électorales.

 

René Guitton: À la fin des années 90, lors de la campagne pour les élections législatives, les militants islamistes de Nazareth avaient fait miroiter à Benyamin Netanyahou le vote massif des Arabes israéliens en faveur du Likoud.

 

Netanyahou fut soudain persuadé de l'urgente nécessité d'offrir aux Musulmans de Nazareth un lieu de culte. L'octroi d'un permis pour construire une mosquée à Nazareth, dans un terrain proche de la Basilique chrétienne, mit le feu aux poudres et suscita l'ire des Chrétiens.

 

Il a fallu l'intervention personnelle d'Ariel Sharon, bien avant qu'il ne devienne chef du gouvernement, pour que ce permis pour édifier une mosquée soit annulé, à la grande satisfaction des instances chrétiennes. Cette affaire, qui a laissé des traces profondes chez les Chrétiens israéliens, avait un arrière-goût de cuisine électorale à la sauce religieuse.

 

C.J.N.: Admettrez-vous qu'Israël est une démocratie coriace où les droits des minorités religieuses sont beaucoup mieux protégés et respectés que dans les pays arabo-musulmans limitrophes, où les minorités chrétiennes sont souvent persécutées et honnies'

 

René Guitton: Vous avez entièrement raison. Israël, ce n'est pas l'enfer pour les Chrétiens! Ces derniers ne sont pas victimes de persécutions comme dans certains pays islamiques voisins. Mais il y a des attitudes hostiles de la part des Israéliens qui se traduisent souvent par une espèce d'harcèlement sournois.

 

Les Chrétiens se sentent de moins en moins bien en Israël. Je ne parle pas seulement des Arabes chrétiens israéliens, là on pourrait comprendre car ces derniers sont avant tout des Palestiniens, mais aussi des Chrétiens étrangers d'origine occidentale, qui ont de plus en plus de difficulté à obtenir des visas de longue durée pour séjourner en Israël'

 

Ils sont loin d'être en odeur de sainteté, notamment ceux originaires d'Europe. Les Israéliens les soupçonnent d'être moins proisraéliens, selon leurs critères, que les Évangélistes américains. Ces religieux Chrétiens occidentaux ressentent de plus en plus fortement cette espèce d'ostracisme.

 

C.J.N.: Vous citez dans votre livre une donnée très éloquente: des enquêtes d'opinion menées en Israël en 2008 montrent que près de 70% de la population juive israélienne déclarent ne pas souhaiter avoir des voisins Arabes musulmans ou chrétiens.

 

René Guitton: Pour la majorité des Israéliens, les Arabes chrétiens sont des Palestiniens, donc suspects d'être des suppôts de la cinquième colonne. Le fait qu'ils soient Chrétiens est secondaire. Israël a aussi maille à partir avec l'Église catholique et les instances vaticanes.

 

En défendant les Palestiniens chrétiens, l'Église catholique devient propalestinienne. Et, lorsqu'il y a des épisodes comme celui de la dernière guerre à Gaza, les Églises chrétiennes sont suspectées par Israël d'être radicalement du côté des Palestiniens.

 

C.J.N.: La situation des Chrétiens dans les Territoires palestiniens n'est-elle pas très alarmante, surtout depuis l'élection du Hamas'

 

René Guitton: C'est vrai. Les discriminations ou vexations dont les Chrétiens israéliens sont victimes paraissent dérisoires au regard de la situation dramatique vécue par leurs coreligionnaires Palestiniens établis à Jérusalem-Est, en Cisjordanie et à Gaza. Majoritairement latins, ces 49500 Chrétiens représentent 1,2% de la population palestinienne. Leur nombre ne cesse de décliner. Ce qui est un sérieux indice des fragilités des Communautés chrétiennes palestiniennes.

 

C.J.N.: Les perspectives d'avenir des Chrétiens vivant en Cisjordanie sont donc très moroses'

 

René Guitton: Les Chrétiens de Cisjordanie savent qu'ils risquent de faire les frais d'une éventuelle réconciliation entre le Fatah et le Hamas. Réconciliation qui se traduira par une islamisation plus grande des institutions politiques palestiniennes. Les Chrétiens de Gaza sont confrontés aux même difficultés que leurs compatriotes Musulmans, à cela près qu'ils subissent en plus le fait d'être une minorité sur des terres régentées par le Hamas.

 

Les islamistes radicaux souhaitent l'instauration d'un État théocratique musulman en Palestine et prônent l'application d'un régime juridique particulier pour les non-Musulmans. Pour les islamistes, tout Chrétien est forcément le complice des Américains car, à leux yeux, un Chrétien=un croisé=un prooccidental: donc un proisraélien. Les Chrétiens résidant à Jérusalem-Est, à Gaza et en Cisjordanie sont bien conscients que leurs perspectives d'avenir sont très sombres.


In an interview, French author René Guitton talks about the difficulties faced by Christians in the Middle East, primarily in Israel.

 

Membre Juif.org





Dernière mise à jour, il y a 42 minutes