Blog : Ragazou

Par Emmanuel Hollander

 

 Israël n'a jamais été aussi impopulaire dans l'opinion publique européenne et, depuis peu, dans l'opinion américaine. Nos défenseurs inconditionnels de la politique israélienne y voient le retour de l'antisémitisme : « Israël est le Juif des nations ! », affirmation souvent assortie d'un définitif « C'est la faute aux médias ». 

 

Et aussi la faute aux ONG, au Juge Goldstone (sioniste depuis toujours), aux alterjuifs, comme les nomme Shmuel Trigano dans la revue Controverse. Même Obama est antisémite pour Haga Ben Artzi, beau-frère de Bibi Netanyahou : le Président n'a-t-il pas écouté les sermons du révérend Wright durant vingt ans ? 

Nous savons bien que rien n'est simple au Moyen-Orient. Si Israël avait eu pour voisins des Hollandais rationnels ou des Italiens amoureux de la vie, le problème aurait sans doute été plus facile à résoudre. Et si Yitzhak Rabin n'avait pas été assassiné, Israël ne serait probablement pas devenu une « marque » ressentie négativement par les opinions publiques occidentales. 

Cette réaction de rejet serait-elle due, comme on l'entend, à une maîtrise insuffisante de l'utilisation des médias par les Israéliens ? Non, car en amont de la communication, il y a le produit lui-même.

 

Vous pourriez dépenser des milliards pour convaincre le monde que l'opération « Plomb durci » a été menée avec le souci d'épargner la population civile de Gaza, vous n'y parviendriez pas car les images ont montré qu'il n'en était rien et puis, en matière de communication politique, l'essentiel n'est pas ce qui est dit mais ce qui est ressenti (Jacques Pilhan).

 

Ainsi, lorsqu'une bombe tombe sur une école et que toutes les télés du monde cadrent sur les dégâts et les victimes, vous aurez beau entendre proclamer que le nombre de morts a été grossi ou, qu'au Darfour, c'est pire, cela ne changera rien au ressenti et au ressentiment des téléspectateurs. 

Certes, un conflit armé est l'affaire des militaires mais rappelons le propos de Clémenceau : « La guerre est chose trop sérieuse pour être laissée aux militaires ». C'est aux responsables politiques qu'il revient de définir la stratégie politique - y compris l'option armée.

 

Une stratégie claire que les communicants auront à illustrer (images et textes) comme une évidence qui va s'imposer aux médias et à leurs audiences. Le contraire, en somme, de la cacophonie sur le gel des nouvelles implantations et les ruses dérisoires qui ne cessent de saper la perception d'Israël. 

Pour rester un instant encore sur le terrain de la communication, soulignons que le timing y est toujours un élément déterminant. Indépendamment de savoir si les 1.600 nouveaux logements prévus sont défendables -et ils ne le sont pas si l'on veut négocier sérieusement-, annoncer leur construction le jour de la venue du Vice-Président Biden à Jérusalem est à l'opposé absolu du moment favorable.

 

Les conséquences de cette provocation mettront du temps à passer car c'est toute l'Amérique qui a reçu cet affront en pleine figure de la part d'un pays ami qu'elle a soutenu jusqu'ici comme nul autre.

 

Il est vrai qu'Israël est une démocratie parlementaire : son gouvernement a souvent besoin de l'appui du minuscule parti ultra-religieux Shas, mais comme l'a observé l'éditorialiste du New York Times, Roger Cohen (encore un Juif en proie à la haine de soi ?), on voit mal les orientations américaines devoir s'incliner devant les caprices du Shas ou devant l'agenda à peine caché de gouvernants qui ne veulent en aucun cas de deux Etats. 

Pour redonner à Israël le rôle qui lui revient, il lui faudra réformer un système électoral entraînant des alliances qui rendent le pays captif de petites formations situées dans un autre monde. Espérons que les Israéliens auront cette sagesse. Leur survie en tant qu'Etat en dépend sans doute. 

 

Merci Ghila