Blog : Ragazou

Pour des raisons qui tiennent plus de la « realpolitik » que de l'éthique, Israël n'a jamais pris officiellement position sur le terrible massacre des Arméniens par les Turcs durant la Première Guerre Mondiale, qui s'apparente à un véritable génocide, puisque le gouvernement des Jeunes Turcs entreprit de déporter et massacrer toute la population arménienne qui vivait en Anatolie et sur le Haut Plateau arménien. Un million deux cent mille Arméniens périrent alors dans des conditions atroces.

Aujourd'hui, alors que le gouvernement turc laisser libre cours à sa haine anti-israélienne et antijuive, des voix s'élèvent pour demander à ce que le gouvernement israélien cesse d'avoir une attitude de retenue ou de soumission face aux insultes répétées de la part du régime turc, et prenne notamment la décision hautement symbolique de reconnaître officiellement le génocide arménien.

Quatre professeurs de l'Université Bar-Ilan et de l'Université de Georgetown à Washington, ont adressé une lettre en ce sens au Premier ministre Binyamin Netanyahou, lui demandant « de prendre une décision éthique concernant les demandes arméniennes, puisque le ménagement de la Turquie n'est désormais plus de mise ». Les signataires de Bar-Ilan sont les Professeurs Yossi Katz, David Tzouriel et Yaakov Katz, et pour Georgetown, le Professeur Ofer Israeli.

Le texte dit notamment : « ?nous dénonçons l'hypocrisie grossière du gouvernement turc, qui montre qu'en dépit de tous les accords signés avec Israël, il se tourne résolument vers ses ennemis les plus radicaux qui en appellent à sa destruction (?) Il est grand temps qu'Israël prenne l'initiative et réagisse à toutes ces attaques avec fermeté ».

Avec un brin d'ironie, les signataires demandent au gouvernement israélien de se référer également à d'autres dossiers dans lesquels la Turquie est embourbée, en lançant le message suivant aux autorités turques : « Le gouvernement turc devrait envisager des concessions douloureuses en faveur de la paix, en renonçant à la moitié de l'île de Chypre, ainsi qu'à la région d'Alexandrette, conquise à la Syrie en 1938. De même, Ankara devrait proposer au minimum un statut d'autonomie au peuple kurde qui vit dans les régions du sud-est de la Turquie »?

A la fin de la lettre, les signataires espèrent « que le gouvernement israélien ne fera que se conformer aux nouvelles règles du jeu édictées par Ankara, et qui exigent que Jérusalem ôte désormais ses gants, et réponde aux attaques turques ? directes ou indirectes ? comme il se doit. »

On ne peut hélas que douter fortement que le gouvernement israélien s'engage dans cette voie. Dans le magazine de « Maariv » de mardi, un dossier spécial était réservé aux suites à donner à la grave crise qui touche les relations israélo-turques. Interrogé sur la question le ministre de l'Industrie et du Commerce, Binyamin Ben Eliézer (Avoda), indiquait déjà « que l'heure devait être à la restauration des liens stratégiques avec la Turquie », rajoutant même avace aplomb « que la détérioration des relations entre les deux pays était également imputable à Israël, qui s'était rendu coupable de plusieurs faux-pas envers la Turquie, notamment en déclenchant l'Opération ?Plomb Durci' en pleines négociations avec la Syrie par l'entremise d'Ankara, et ensuite, lors de la réception ?insultante' de l'Ambassadeur turc en Israël ».

Par ailleurs, il est fort à parier que Washington, qui considère la Turquie comme un pion stratégique de première importance, fera peser tout son poids (sur Israël) pour que l'attitude inadmissible des dirigeants turcs envers Israël passe rapidement en « pertes et profits », dans le but de satisfaire les « intérêts supérieurs »?américains.

par Shraga Blum