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Blog : Carnets d'actualitéLe pape et l'amourEh bien, comme disait ici-même notre très chrétien Maurice Clavel en 1969 dans ses moments de truculence, « Il faut encore nous farcir les monothéismes ! » C'est ce que j'ai voulu faire plus modestement, et en termes plus choisis, en écrivant dans la préface du premier tome de cette « Anthologie du Savoir » dont les chercheurs du CNRS m'ont confié l'intimidante direction : « Leurs bûchers ont enflammé l'histoire mais leurs souffles ont illuminé la culture... ». « Enflammé l'histoire ? » On pourra donc chercher aujourd'hui dans les textes sacrés, ou plutôt dans leurs interprétations multiples, si les islamistes ont vraiment le devoir de massacrer les chrétiens d'Irak, si l'enseignement de la charia s'impose dans les écoles coraniques de Grande Bretagne, s'il est légitime d'y désigner aux enfants le juif comme l'ennemi, et si ,de leur coté ,les Israéliens les plus orthodoxes ont la moindre excuse à opposer efficacement la loi de leur Dieu aux décisions des Nations Unies. Mais il faudra voir aussi (l'actualité y oblige) où en sont les trois religions du Livre sur les problèmes du sexe et de la permission de faire l'amour sans procréation, sans coïtus interruptus (le péché d'Onan) ou en utilisant des méthodes anticonceptionnelles. Cela conduit d'ailleurs, pour revenir à un passé récent, à se demander en quoi l'usage de la pilule et du préservatif a pu constituer une telle rupture au sein de civilisations aussi profondément imprégnées de religion que les nôtres. Sur toutes ces questions, les docteurs de la loi et les différents pasteurs répondent en brandissant non pas la foi mais le dogme, non pas même la tradition mais les rites. Ah ces rites ! Il n'y a désormais de la place que pour eux. Si vous évoquez l'universalité de l'amour ou le caractère individuel de la foi, on vous répond en évoquant l'étoile, la croix ou le croissant, la kippa ou la burqa, sans oublier, bien sûr, les draconiens interdits alimentaires. Les gardiens du temple ont tellement peur du vertige que procure la liberté qu'ils veulent s'assurer de la continuité de la transmission, par la mécanique imposée des habitudes. Mais c'est le pape qui, aujourd'hui, nous intéresse, ou, plus directement, sa nouvelle conception de la sexualité. Je ne trouve que notre confrère « La Croix » pour restituer dans leur riche contexte les phrases à la fois brèves et conflictuelles des déclarations de Benoit XVI. Je remarque d'abord que le Saint-Père est descendu des cimes de la théologie et des arcanes de la philosophie comparatiste pour assumer son rôle non pas seulement de « vicaire du Christ » mais de chef d'Etat, pour entrer dans une cité non-éternelle, et pour tenter d'humaniser un Vatican auquel l'évolution des m'urs et les contraintes de la modernité imposent un réalisme incontournable. Ses prédécesseurs avaient divinisé les rigueurs d'une loi devenue inhumaine. En évoquant précisément l'humanisation de la pratique de l'acte sexuel, il a enfin introduit la notion de responsabilité. Et désormais, « le prostitué » doit se soucier de ne pas entrainer son prochain dans sa maladie. On pourrait observer, comme le font d'ailleurs les évêques français, que cette responsabilité le rapproche du Christ. Mais le Pape ne va pas encore jusque là. Les principes, écrit-il, sont certes éternels mais il faut les accommoder. Certaines choses sont donc possibles ici, mais pas là, tout dépend des risques, du climat, de l'air du temps. Bref, le Saint Père s'adapte. C'est qu'il était devenu, pour lui comme pour n'importe quel catholique conséquent, scandaleux de culpabiliser des êtres atteints du sida en leur affirmant qu'il était contraire à leur foi d'utiliser un préservatif pour protéger leur partenaire de la contagion. Scandaleux mais aussi absurde. Et cela ne peut plus être pris au sérieux aujourd'hui. Le temps n'est plus où notre ami Maurice Clavel, lorsque le pape avait interdit la pilule - tout en persistant, bien sûr, à condamner l'avortement - pouvait s'exclamer dans nos colonnes : « Mais enfin, personne ne vous force à être catholique ! Pourquoi éprouvez-vous ce besoin de forniquer avec la bénédiction de l'Eglise ? Vous voulez tout avoir, le plaisir et la sainteté ! » Il s'agit désormais, pour les fidèles, de « responsabiliser » leur comportement, et l'on devrait laisser aux grands mystiques le choix de décider avec Saint Augustin si, après une vie consacrée à l'amour des femmes, ils veulent choisir de n'être plus disponible que pour l'amour de Dieu. Je voudrais conclure sur deux faits remplis de lumière : la persécution des chrétiens d'Irak a suscité une réaction que, pour ma part, j'ai très longtemps attendue. Elle se traduit par un texte d'une fermeté rayonnante et signé par une trentaine d'écrivains et d'intellectuels arabes - chrétiens et musulmans - du plus haut niveau. Cette fois, ils ont accepté de témoigner ensemble, ce qui est rare. Ils ne se sont pas préoccupés de savoir s'ils alimentaient où non l'islamophobie. Aucune solidarité viscérale, clanique ou tribale n'a freiné leur indignation collective. Si surprenant que cela paraisse, cela n'était pas encore arrivé. Le professeur Mohammed Arkoun aurait été heureux que cela se passe en France. C'était, selon lui, avec le respect et le souffle des principes hérités de la Révolution de 1789 que l'esprit d'une grande réforme de l'Islam pouvait renaître. Je souligne cette profession de foi lorsque j'entends les militants de la lutte contre l'islamophobie dénoncer l'usage du mot « républicain ». Il s'agit selon eux d'un mot discrédité par l'usage que peuvent en faire les xénophobes et les racistes. Alors là, comme Stéphane Hessel nous y invite, je « m'indigne ». Nous avons failli abandonner à l'extrême droite les mots de nation, d'honneur et de sécurité. Parfois même le mot laïcité. Pour la République, aucune concession n'est possible : son épopée, c'est notre identité. Et puis je ne veux pas terminer sans évoquer la disparition d'un romancier et celle d'un militant en tous points admirables. Edmond Amran El Maleh et Abraham Sarfaty sont tous deux marocains, juifs et pro- palestiniens sans être antisionistes. Ils sont tous deux membres du parti communiste. Ils ont été entourés, le premier d'admirateurs, le second de disciples lorsqu'ils ont passé de longues années dans les geôles d'Hassan II. Ils tenaient tous deux à être des « Arabes juifs » comme ils disaient. Il faut découvrir le « Parcours Immobile », d'Edmond Amran El Maleh. J.D.
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