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Blog : Carand

LA MEMOIRE MARANE

La mémoire marrane
par Albert Bensoussan
Par webmaster, lundi 15 octobre 2007 à 11:57 :
: Points de vue :
Sur Le BLOG de TERREDISRAEL.com

On le sait, on est juif par sa mère, car dans notre tradition,
c'est la mère qui dans sa matrice fait de la créature
un juif par le sang. Eh bien !
on est aussi marrane par la mère
en parfaite filiation judaïque.

Par ce mot « marrane », qui signifie en espagnol « porc »
(puerco marrano), on désigna en Espagne à partir de 1492,
ceux des Juifs qui n'avaient pas pris le chemin de l'exil
et qui, pour rester à leur place et en place, avaient dû
se soumettre à la conversion.
On les appelait donc conversos.
Mais si grande est la foi juive, et si fort le poids de nos
traditions, que ces convertis par force, plus que par
conviction, gardèrent pour beaucoup la mémoire hébraïque,
qu'ils se transmirent de génération en génération, et par
voie maternelle. C'est pour eux qu'on réactiva le tribunal
de l'Inquisition, chargé de veiller à la pureté de la foi
et de châtier ces mauvais « nouveaux chrétiens ».
De hautes figures espagnoles comme sainte Thérèse d'Avila
ou Luis Vives eurent quelques démêlées en raison de cette
fidélité religieuse : la de la première était juive, et
le second dut fuir sa Valence natale pour devenir un des
maîtres de la philosophie à la Sorbonne.
Quant à Cervantès, on sait seulement que son père lui fit
mener une vie nomade, comme fuyant quelque danger sur la
terre aride de Castille.
Naguère, la grande romancière Ana María Matute, visitant
Palma de Majorque, sentit dans ses narines monter l'odeur
du bûcher sur la place Gomila : elle ignorait tout de ce
passé, mais voilà qu'elle apprend que c'est là qu'on
brûlait les Juifs, dans lesquels elle reconnaît ses
ancêtres ; l'auteur des Brûlures du matin devait alors
assumer cette mémoire, et je me rappelle sa s'ur, tout
autant convaincue, arborant désormais autour du cou une
étoile de David.
Aujourd'hui paraît un récit sous forme de confession de
l'écrivain cubain d'origine espagnole (sévillane par
sa mère) Eduardo Manet, dramaturge parisien bien connu.
Son Marrane dit, après quelques autres, ce que fut cette
mémoire et cette pieuse transmission. Sa mère, en effet,
lui parla un jour du « Grand Secret »,
car il avait treize ans, et que c'est à cet âge ?
celui de la Bar Mitzvah ? qu'il devait être affranchi
sur son origine.
La mère rapporte sa propre révélation qui lui vient, non
de sa mère, mourante et la confiant à sa grand-mère, mais
de cette dernière, Asunción, et de son vrai nom Lia. Car,
dans la famille d'Eduardo Manet, toutes les femmes ont
deux prénoms, et l'on retrouve nos vraies figures
hébraïques : Esther, Lia, Judith, Dinorah' La mère, qui
s'appelle en fait Sarah, rapporte donc à son fils sa
surprise en découvrit tout ce judaïsme caché :
la mezouza dissimulée sous le chambranle, et qui fait que
la grand-mère ne voulait pas recevoir ses voisines chez
elle, les préparatifs de Pessah, qui reviennent depuis
des siècles aux mains de ces femmes, avec la chasse au
hametz, représenté ici, fidèlement à la tradition,
comme un jeu au caractère enfantin, la préparation
des matsot'
On se souviendra du fameux film de Frédéric Brenner,
Les derniers marranes, et de ces faux chrétiens et
vrais Juifs préparant en grand secret, et toutes
fenêtres fermées, la cuisson des pains azymes et
le Seder de Pessah.
Nous sommes, avec Eduardo Manet, dans le droit fil de cette
récupération de mémoire. C'est pourquoi, nous devons lire
ce livre, et nous émerveiller de cette foi, de cette emouna,
qui, contre vents et marées, entre Inquisition et
persécution, ou rejet, a su garder au fond des foyers, par
la grâce de ces femmes, de ces Justes qui, à l'instar
justement d'une Judith ou d'une Esther ? ces prénoms tant
en faveur dans la famille Manet --, surent sauvegarder un
peu de notre judaïsme.
Suffisamment, en tout cas, pour amener, dans les années
soixante-dix, de nombreuses familles « marranes » à faire
leur alya, et à redevenir, comme bon nombre d'entre eux
l'avaient fait naguère, en fuyant le Portugal pour
s'installer à Bayonne ou à Bordeaux, des Juifs accomplis.
Eduardo Manet
était notre ami, et voilà qu'il est notre frère.

Albert Bensoussan
Membre Juif.org





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