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Blog : Torah-Box

Alyah & Tracas : Chez le Rav Grossman

Chaque mercredi, Déborah Malka-Cohen nous plonge au cœur d'un quartier francophone de Jérusalem pour suivre les aventures captivantes d'Orlane et Liel, un jeune couple fraîchement arrivé en Israël et confronté, comme tant d'autres, aux déboires de la Alya...

Dans l’épisode précédent : Les deux couples, Orlane et Liel et Tamara et Avi, se retrouvent ensemble et unissent leurs forces face à l’épreuve de Tamara. Ils se préparent en vue de leur entretien avec le Rav Grossman lorsque Rivka confie à Orlane les soucis qu’elle a eus dernièrement avec Osnat, son aînée. Elles sont toutes deux en train de discuter en tête-à-tête lorsque Tamara fait brusquement son entrée, tombant évanouie sur le sol du salon…

Je m’étais précipitée au-dessus de Tamara pour essayer de la réveiller et la remettre sur pied mais vu la circonférence de mon ventre, je m’étais vite rendue compte que j’étais dans l’incapacité de lui venir en aide. Résultat : je tremblais pour elle. Je sentais les pulsations de mon cœur cogner fort contre mon thorax. Pour ne pas effrayer ma nièce qui était dans les bras de Rivka, je hurlais intérieurement une prière à Hachem : “Je T’en prie, fais qu’elle se réveille, fais qu’elle se réveille. Aide-la, Hachem ! Aide-nous !”.

Rivka avait eu le bon réflexe d’aller chercher un verre d’eau. Elle me le donna en me conseillant de lui asperger le visage avec. Ne perdant pas une seconde, j’exécutais ce geste. Quelques secondes plus tard, avec l’aide de D.ieu, Tamara revenait petit à petit à elle. La sachant hors de danger, je respirais de nouveau normalement. Pour qu’elle reprenne ses esprits, je la dirigeais vers le canapé. Avec ses grands yeux verts, elle ne put s’empêcher de me dire :

“Bah alors, tu en fais une tête !

– Et toi ? Tu ne t’es pas encore vue, c’est pour ça que tu dis ça.  

– Tu nous as fait une belle frayeur, Tamara, avait dit Rivka.

– Tu veux bien me redonner ma fille ?

– Ne préfères-tu pas plutôt te reposer ? Tu viens de faire un beau malaise. En attendant que tu te remettes complètement, je peux la garder si tu veux.

– Oui, tu as raison, merci Rivka. Juste le temps que ma tête arrête de tourner.

– Tu veux que j’aille te chercher un Doliprane ou quelque chose de plus fort ?”, avais-je demandé.

Après un rapide coup d’œil sur la table de la salle à manger, d’un air malicieux, son regard s’était arrêté sur nos mousses au chocolat à peine entamées… “Je crois que j’ai plutôt besoin de sucre”, avait-elle finalement dit.

En riant, j’allais lui chercher son “remontant” et repris ma place auprès d’elle. Plus elle dégustait son dessert, plus elle reprenait des couleurs. Ce qui m’avait confirmé qu’elle allait nettement mieux, c’est quand elle s’était mise à nous poser des questions avec son franc-parler coutumier :

“Avant que je ne m’effondre sur ton sol, de quoi vous parliez toutes les deux ? En passant, Orlane, tu n’as jamais pensé à mettre un tapis ? Juste au cas où une autre personne viendrait s’évanouir ! Bah non, évidemment, dans un pays aussi chaud, on bannit tout ce qui est moquette et tapis, sinon bonjour le nid à bestioles.”

Refusant de divulguer ce que Rivka m’avait confié sur son aînée Osnat, j’avais essayé de bifurquer la conversation en lui proposant de rester se reposer plutôt que d’aller voir Rav Elnathan. “Comme ça, tu seras en forme demain pour notre entretien avec l’éminent Rav Grossman.

– Bon, j’ai compris. Toi, tu ne me diras rien ! Rivka de quoi vous parliez ?”

Mon amie, qui jouait avec ma nièce, s’était mise à sourire avant d’expliquer une nouvelle fois ce qui la préoccupait. Dès la fin de sa confession, Tamara ne s’était pas faite prier pour donner son avis :

“Écoute, ta fille a dix-huit ans. C’est normal à son âge de jouer les têtes dures. Un grand Mazal Tov pour avoir été acceptée. Je suis d’accord avec vous deux, un nouveau cadre va lui faire le plus grand bien. Juste pour information, je trouve que tu as de la chance que cette “rébellion” ne s’est pas déclarée avant. De nos jours, c’est vers douze ans que les enfants deviennent arrogants, têtus, sont persuadés qu’ils savent mieux que les adultes car ces derniers ne comprennent rien à leur vie, à leur souffrance, à leurs peurs, à leurs doutes.

– Et comment tu sais tout ça, toi ?

– Je ne sais pas si tu te souviens, Orlane, mais avec maman, j’ai été une ado très compliquée à gérer.

– Osnat est loin d’être aussi difficile que cela. Il ne faut pas noircir le tableau non plus. C’est juste qu’il y a eu une période où j’ai eu du mal à lui parler. Par exemple sur la longueur de sa jupe, j’aimerais bien lui toucher deux mots mais j’ai peur qu’elle ne se braque si je me mets à lui imposer des centimètres en plus, alors que selon la Halakha elle est juste, mais ça va.  

– Bien sûr qu’elle va se braquer ! Et puis, fais-moi plaisir d’oublier cette histoire de Tiyoul dont tu m’as parlé. C’est évident qu’elle a dû se prendre des remarques, comme chaque jour à l’école. Ca arrive à tous les ados mais contrairement à d’habitude où elle serait rentrée à la maison, son hâvre de paix, elle était contrainte de rester le soir en compagnie des filles du groupe, qui ont dû lui dire des paroles qu’elle a mal pris. De toute façon, il arrive un moment où les enfants sont propulsés dans leur vie, où ils sont seuls face à leur manière de gérer leurs émotions. Tu ne croyais quand même pas qu’elle allait continuer à te raconter le moindre de ses tracas et à courir dans tes jupons Tsniout chaque fois que quelque chose la contrarie ! Sois fière de ta fille qui prend enfin son envol. À mon sens, si tu veux faire passer un message concernant sa tenue vestimentaire, ce qu’il faut, c’est lui parler l’air de rien de nos matriarches qui étaient la représentation même de la Tsniout, tout en ayant eu des destins extraordinaires. Des femmes fortes qui justement, malgré leurs épreuves douloureuses, ont su réagir de manière exemplaire. Tu peux lui glisser aussi que plus elle ajoutera des centimètres à sa jupe, plus sa connexion avec Hachem sera grande. Elle sentira une grande proximité avec Lui. Enfin bref, tu te débrouilles pour qu’elle ne retienne que les côtés positifs de la Tsniout.

– Très bonne idée Tamara ! Je crois que si maman t’avait entendue parler de cette manière, elle aurait été fière de toi.

– De qui crois-tu que je tiens cette admiration sans borne pour Sarah, Rivka, Ra’hel et Léa ? D’elle bien sûr. C’était sa méthode, de ne pas rentrer directement en conflit avec moi et de m’amener à la réflexion, en me recadrant subtilement.”

D’un coup, j’eus une idée et je m’étais empressée de la partager avec elles :

“Mais j’y pense ! Betsabée doit passer tout à l’heure. Nous devons reparler de mon projet de marque.

– Ah ça, c’est super comme projet. Je t’ai toujours dit ma sœur que tu avais un don non seulement pour le dessin mais en plus pour repérer des produits qui plaisent au grand public.

– Merci Tamara. Je me disais que peut-être, Rivka, si tu es d’accord, je pourrais organiser une séance de croquis avec ta fille. Je dessinerais de nouveaux modèles et lui demanderai son avis sur certaines de mes créations et peut-être que ça lui donnerait confiance en elle. Penses-tu qu’elle serait d’accord de venir ici ?

– Tu plaisantes ! Osnat va être folle de joie quand je vais le lui proposer. Franchement les filles, je vous remercie, vous êtes formidables avec tous vos conseils.”  

Nous étions encore en train de discuter quand Liel était venu vérifier ce que nous faisions car lui et Avi étaient en train de nous attendre depuis tout à l’heure dans la voiture. N’étant pas certaine que Tamara soit totalement remise de son malaise, j’avais expliqué à mon mari que finalement nous restions à la maison. Je le chargeais de nous rapporter tout ce que nous devions savoir avant l’entretien avec Rav Grossman.

– C’est entendu. À plus tard, mesdames.”

 

* * *

 

Le lendemain, pendant qu’elle installait sa fille dans le siège auto, Tamara, tout à fait remise, me confiait qu’elle était un peu stressée de sa rencontre avec le Rav.

“C’est normal. Ce n’est pas tous les jours qu’on a ce mérite.”

Une heure avant, j’avais montré à Avi et à ma sœur un petit film qui avait été réalisé sur le Rav et qui montrait l’étendue de ses actions et le bien qu’il faisait autour de lui au quotidien. À la fin du visionnage, Liel avait conclu : “Comment la volonté d’un homme qui détient une Emouna sans borne arrive à déplacer des montagnes. Si on faisait tous comme lui, le monde serait différent.”

Une fois arrivés devant le secrétaire particulier du Rav, j’étais moi aussi nerveuse. À tel point que je réalisais avoir oublié toutes les recommandations que Rav Elnathan nous avait données.

Je soufflais mon angoisse à mon mari qui me rassura en une phrase : “Je crois que le mieux pour nous, ce sera de l’écouter.”

Nous avions tous les cinq, bébé compris, dû patienter dans une sorte de salle d’attente, où des boissons et des gâteaux avaient été mis à disposition. Pour patienter, Avi nous avait fait part du fait que d’ordinaire, il n’était pas très “rabbins”.

“Que veux-tu dire par là ? avais-je demandé.

– Tu sais, j’ai des tas d’amis autour de moi qui vont pèleriner sur les tombeaux des Tsadikim mais moi, ce n’est pas mon truc.  

– Il n’y a pas que tes amis, mon ami ! Moi aussi, je suis partie pèleriner avec Orlane sur la tombe de Ra’hel Iménou et je peux te dire que ce n’est pas aussi terrible qu’on ne le pense. Au contraire, on se sent ressourcé.

– Eh bien, j’en apprends des choses, sur toi, Tamara ! Tu comptais me le dire quand ?

– J’allais te le dire… C’est juste que cela m’est sorti de la tête. N’en fais pas toute une histoire.

– Je n’en fais pas une toute histoire, je pensais simplement qu’après ce que j’ai découvert…”

Pendant qu’ils échangeaient encore quelques phrases tous les deux, portable en main je montrais à Liel le nombre de messages extraordinaires que j’avais reçus depuis que j’avais demandé que l’on prie pour la Réfoua Chélema de ma sœur.

Je lui expliquais que sans le soutien permanent de mes amies et de ces inconnues qui m’écrivaient sans cesse qu’elles étaient de tout cœur avec moi dans cette épreuve, je n’aurais probablement pas tenu le choc.

Cela m’avait permis aussi de suivre les innombrables miracles qui s’étaient passés, à cause ou grâce à ce que nous vivions. Comme ce groupe de femmes qui ne se couvraient pas la tête et qui avaient décidé de prendre sur elles cette merveilleuse mais combien difficile Mitsva. D’autres qui avaient abandonné la confection du pain en l’honneur du Chabbath, car leur emploi du temps ne le leur permettait plus, et qui s’étaient remises à faire leur pâte et à accomplir le prélèvement de la ‘Hala. Ou d’autres encore qui étaient en voyage à Ouman et qui avaient prié très fort toutes ensembles en criant le nom de Tamara Yokhéved.

Liel et moi étions encore en train de découvrir ces multiplications de Mitsvot partout dans le monde quand le secrétaire nous informa que le Rav allait nous recevoir et nous demanda de bien vouloir le suivre.  

En pénétrant dans son bureau, ce qui m’avait le plus interpellée, c’est que l’atmosphère qui y régnait m’avait immédiatement apaisée. Au moment des présentations, à notre surprise générale, on constatait que le Rav se débrouillait très bien en français. Mais le plus déstabilisant, du moins les premières minutes, c’était qu’il était très accessible ! Non pas que je m’attendais à suivre un protocole digne de la reine d’Angleterre à devoir effectuer une révérence, mais je m’attendais à une distance naturelle qui allait s’imposer entre lui et nous. Alors que ce fut le contraire ! J’avais l’impression que nous étions des membres de sa famille. Au début, il s’était inquiété de savoir comment nous allions. Il avait pris le temps de nous demander un par un si tout allait bien dans nos vies. Et puis vint le tour de Tamara qui lui expliqua rapidement la situation :

“Avec mon mari et ma fille, nous rentrons dimanche pour…”

D’un coup, le Rav ne la laissa pas finir et lui posa une question :

“Pourquoi tu rentres ? Tu n’es pas bien ici ?

– Si très bien même, mais je suis malade et je dois me faire soigner.

– Tu as raison mais si tu changes d’avis, on a de très bons docteurs ici. Combien tu as d’enfants ?

– Une pour le moment, avais répondu Avi.

– Béézrat Hachem, tu m’écriras bientôt pour m’annoncer une Brit-Mila. Je vais prier pour ta Réfoua Chélema et pour que ta famille s’agrandisse mais il faut que tu t’engages à prendre une Mitsva sur toi, que tu n’as pas l’habitude de faire.”

Nous étions les quatre silencieux, pendus aux lèvres du Rav.

“La Chemirat Halachon. Est-ce que tu penses que tu peux prendre sur toi de ne pas parler une heure par jour ?

– Oui, je pense que je peux le faire. Mais vous pensez que je suis malade parce que je parle trop ?, n’avais pu s’empêcher de demander Tamara.

– Suis- je D.ieu pour en connaître la raison ? Non ! Mais nous tous avons besoin de nous taire, bien plus qu’une heure par jour d’ailleurs, mais c’est très difficile ! Mais toi, je sais que tu peux y arriver. Rentre chez toi dimanche et promets–moi qu’après la Brit de ton fils, tu viendras ici. Et vous, monsieur que faites-vous dans la vie ?”

La question était pour Avi, qui lui expliqua qu’il était dentiste :

“J’aimerai d’ailleurs vous offrir mes services et m’engager dans vos actions.

– Béta’h ! Ézé Tsadik ! Dès que ta femme ira mieux, tu reviendras me voir et je te montrerai comment tu vas pouvoir m’aider. Tu vas soigner les caries des enfants.”

La conversation s’était achevée sur une distribution de Brakhot dont celle d’un très bon Chalom Baït pour nous tous.  

À partir de ce moment, je sus que tout irait bien pour Tamara. J’avais comme un ange qui m’accompagnait partout à chacun de mes pas, pour me dire à quel point Hachem veillait sur nous. Même si je ne savais pas encore qu’une belle surprise nous attendait…

Suite à la semaine prochaine…

Membre Juif.org





Dernière mise à jour, il y a 31 minutes