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Culture Israël

En BD, le métier de journaliste est un prétexte

Depuis mai, les abonnés de Canal + peuvent regarder la saison 2 de Reporters. En bédé, les éditions Delcourt, viennent de sortir «Journaliste», un manga qui a pour cadre la rédaction d'un quotidien japonais. «Journaliste», même s'il ne résiste pas à reprendre un des vieux fantasmes du métier («la vérité seul contre tous, choisir sa carrière ou la déontologie»), fait un choix plutôt rare en bande dessinée: centrer l'oeuvre sur la difficulté d'excercer sa profession. Car le plus souvent, en bande dessinée, ce métier n'est qu'un prétexte.

Le journaliste, personnage de fiction' Ce n'est pas étonnant, car à l'instar de quelques autres professions (agent secret, mafioso, prostituée), le journalisme a nourri l'imaginaire de nombreux auteurs à travers les âges, aussi bien sur papier qu'à l'écran, et notamment en bandes dessinées.

Tintin reste incontournable. Il cumule le double avantage d'être le reporter et le personnage de bande dessinée le plus connu dans le monde. Il a fait rêver des millions d'enfants à travers ses voyages et ses aventures, et suscité plus d'une vocation de journaliste (même s'il est déconseillé aux aspirants journalistes de citer Tintin dans un oral d'école). Notons d'ailleurs qu'hormis de très rares exceptions, on ne le voit jamais faire son boulot de reporter.

Autres personnages célébrissimes, Spirou et Fantasio reprennent l'excuse de la profession de journaliste. Si au départ, le premier est groom, très vite il va rejoindre Fantasio comme journaliste. Là aussi, on ne les voit jamais faire leur taf, sauf quand la présentation d'un reportage permet de lancer une aventure. Ainsi, c'est dans une salle obscure pour la première d'un de leur documentaire que débute l'histoire du tome 40, «La Frousse aux trousses».

«Comment pratiquer le métier de journalisme» et «quelle déontologie avoir» sont des questions que les différents auteurs ne posent pas. Une exception, le Journal d'un Ingénu, paru l'année dernière, de Emile Bravo. L'action se déroule pendant la deuxième guerre mondiale, Spirou est encore groom et Fantasio symbolise le journaliste plus intéressé par les scoops de star que par l'actualité internationale. Convaincu que la liaison entre une chanteuse et un boxeur est plus importante que cette petite bande d'Allemands qui discutent dans l'arrière-salle.

L'aventure chez Tintin et Fantasio ou le thriller policier chez Ric Hochet: le métier de journaliste reste un prétexte. Profession conduite à fréquenter des milieux différents, à voyager dans de nombreux pays, il est naturel pour un journaliste de vivre de nombreuses aventures et cela ne surprend pas le lecteur. Le «vrai» job (la rédaction d'un article, les problèmes déontologiques, la relation avec la rédaction...) restent des problèmes d'arrière-cuisine sauf si elles sont traités sous un ressort comique, comme chez Gaston Lagaffe qui est chargé du courrier des lecteurs dans le journal de Spirou.

L'ambiance y est bien loin de celle d'une rédaction classique, sauf peut-être l'éternelle tension de savoir si un capitaine d'industrie va signer des contrats mirifiques, pour ? on ne sait jamais ? sauver le journal peut-être.

Les héros-journalistes sont aussi très nombreux dans la bande dessinée populaire américaine. Impossible de ne pas évoquer Peter Parker (alias Spiderman), photo reporter au Daily Bugle quand il ne saute pas d'immeubles en immeubles dans un costume ridicule. Non moins ridicule, le costume de Superman (alias Clark Kent), qui est à la ville journaliste au Daily Planet de Metropolis. Là encore, le métier de journaliste est plus un prétexte qu'autre chose (dans l'excellente version communiste, Superman: Redson, il n'est même pas journaliste), même si dans les créations les plus récentes cet aspect des personnages est un peu plus exploré.

Plus intéressants, les personnages de Ben Urich et Sally Floyd, qui officient respectivement au Daily Bugle (il a fait l'objet d'une minisérie à lui tout seul) et à The Alternative. Le premier, un personnage récurrent des comics Spiderman et Daredevil, est un journaliste d'investigation rodé et solitaire (et un peu loser façon Woody Allen). La seconde est une jeune et pimpante journaliste, un poil idéaliste. On les retrouve tous les deux dans la série de comics Civil War, sortie en France il y a deux ans. Elle narre la guerre civile entre superhéros après que le gouvernement américain a passé une loi de sécurité intérieure obligeant les vengeurs masqués à se découvrir. Les pro-gouvernement sont menés par Iron Man et affrontent les anti-gouvernement emmenés par... Captain America.

Dans le genre «gonzo», les aventures de Spider Jerusalem, dans Transmetropolitan, sont particulièrement savoureuses. Le rôle de journaliste du personnage est là au c'ur de la série, mais le tout est tellement foutraque qu'on ne peut pas vraiment dire que l'?uvre rende sérieusement compte du métier journalistique. Il n'empêche, de nombreuses questions, depuis le rôle et l'impact des médias à starification de certains journalistes, y sont posées. Et puis c'est surtout fendard.

Si dans la BD francophone, le choix du métier de journaliste est un prétexte à l'aventure, dans les comics américains, il traduit un ressort psychologique plus profond. Dans son idéal, le journaliste est droit, il recherche la vérité et révèle l'imposture, défend par sa plume les faibles et la démocratie. Remplacer plume par force physique et c'est à peu près les mêmes qualités exigées d'un superhéros. Pour un jeune journaliste maintenant habitué à voir son futur métier déconsidéré (faillite, mauvaise réputation, précarité...), ce regard-là remet de la bulle au c'ur.

Laureline Karaboudjan

Image de une: Matthew Roth, personnage principal de la série DMZ. DR

Membre Juif.org





Dernière mise à jour, il y a 15 minutes