English Version Force de Défense d'Israel sur Internet
Inscription gratuite
AccueilInfos IsraelBlogs Juifs et IsraéliensVidéo IsraelOpinions : monde Juif et IsraelLe MagTOP SitesLa BoutiqueJuif.org TV

Culture Israël

Révolte des écrivains contre la Baleine accusée de publier des écrits fascisants

Les éditions Baleine ont annoncé leur intention de publier un roman de François Brigneau, l'un des fondateurs du Front national, condamné à maintes reprises pour antisémitisme. Didier Daeninckx, figure du roman noir français, cofondateur du Poulpe, qui a toujours combattu l'antisémitisme et le racisme avec détermination, explique pourquoi il n'accepte pas ce «coup de force».

Pourquoi vous opposez-vous avec vigueur à la publication d'un roman de François Brigneau aux éditions Baleine'

Didier Daeninckx: Les éditions Baleine constituent une exception dans le paysage littéraire. Elles ont été créées en 1995 par Antoine de Kerverseau et Jean-Bernard Pouy sur une base résolument antifasciste. L'activité principale du «Poulpe», le héros que se sont partagés plus de cent auteurs, consistait à traquer tout ce qui, dans ce pays, permettait aux idées brunes de s'installer, d'être dans l'air du temps. Le Poulpe a même réussi à devenir un acteur du combat contre le fascisme rampant. Il signait des pétitions, appelait à manifester en 2002 contre la présence de Le Pen au deuxième tour de l'élection présidentielle. Toute la réputation des éditions Baleine s'est construite sur cette figure emblématique. L'actuelle direction de Baleine dilapide le «capital de sympathie» en faisant entrer le loup dans la bergerie. Le fait de promouvoir un ex-milicien, fondateur du Front national, qui collectionne les condamnations pour antisémitisme, enlève toute crédibilité aux romans qui s'attaquent par exemple, sous le même label, aux menées du ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale.

Quel est l'objectif de la pétition que vous avez signée avec des dizaines d'autres auteurs des éditions Baleine'

Nous avons bien conscience que tous les livres de la collection «Le Poulpe» ne peuvent exister ailleurs. Cette pétition est un signal fort qui montre la détermination des auteurs, qui exprime la violence qui leur a été infligée. Les signataires ont conscience que le retrait de leurs livres du catalogue n'est pas une chance offerte à leurs ?uvres. Ils agissent contraints et forcés. Le plus simple serait que «le boss de la Baleine» reconsidère sa position et comprenne que la viabilité de son entreprise repose essentiellement sur la réputation que les auteurs ont su lui donner. Le temps presse. Le livre de l'ex-milicien Brigneau, dont chaque page stigmatise les «crouïas», les «bicots», les «arbis», les «macaques» doit être mis en rayonnages à la fin du mois.

N'est-ce pas le droit d'un éditeur de choisir ses auteurs'

Un éditeur n'a pas à se comporter en «patron de droit divin». Une maison d'édition est une entreprise particulière qui repose essentiellement sur la valeur intellectuelle apportée par les auteurs. Il existe une sorte de contrat moral qui tient en ces mots: «maison d'édition». «Maison» y est aussi important qu'«Edition». Et dans ce genre de maison, on est accueilli tout autant qu'on accueille. C'est même à cela qu'on reconnaît la qualité d'un éditeur, à ce respect de la personnalité des auteurs. Le patron de Baleine a fait part à dix personnes de son projet de publier le fondateur du Front national et tous l'en ont dissuadé. Fort de la maîtrise du capital de l'entreprise, il a satisfait à son caprice, sans égard pour nous tous.

Vous faites référence à un droit de retrait de vos ?uvres, un tel droit existe-t-il dans le monde de l'édition'

Hélas non. En cas de changement de propriétaire, les auteurs sont vendus avec les meubles sans avoir voix au chapitre! Les journalistes, dont l'activité principale est également l'écriture, disposent de la «clause de conscience» qui leur permet de quitter une direction qui rompt de manière dommageable avec une politique éditoriale. Ce qui survient aux éditions Baleine a au moins le mérite de mettre en évidence cette précarité méconnue du statut d'auteur.

N'avez-vous pas peur d'être accusé de mener un «procès stalinien»?

Il faudrait pour cela qu'on me montre en exemple d'un quelconque «droit de retrait» exigé par Staline! J'ai le souvenir qu'il était plutôt «envahissant». Qui peut dénier à une personne le droit de ne pas vouloir figurer sur la photo avec quelqu'un qui écrit «Si Mussolini m'était conté», qui fait l'apologie de son ami Robert Faurisson' Nous avons demandé à Jean-François Platet de ne pas publier ce livre, dans l'intérêt des auteurs et de la maison d'édition. Il a préféré le coup de force. Il ne nous reste que deux possibilités: nous accommoder de l'indignité ou partir.

François Brigneau n'est-il pas présent au catalogue des éditions Gallimard'

Le livre qu'elles ont publié en 1960, il y a un demi-siècle, est un ouvrage collectif, une série de portraits. Tombé dans l'oubli et jamais remis en circulation. Le problème se pose de manière très différente. Les éditions Gallimard ne se sont pas construites sur une revendication politique antifasciste comme Baleine. Leur histoire est celle de toutes les contradictions de la scène intellectuelle française. Il est clair qu'aujourd'hui elles ne publieraient pas le livre répugnant que les éditions Baleine viennent de mettre en vitrine. C'est ce qui importe.

François Brigneau ne sera-t-il pas au final le seul vainqueur de cette bataille' Son ?uvre de 1949 jouissant brusquement d'une notoriété inespérée'

C'est bien là le paradoxe meurtrier de cette affaire dont seul le patron de Baleine porte la responsabilité. Jean-François Platet prétend aujourd'hui avoir voulu attirer l'attention des médias sur sa petite entreprise, oubliant qu'en faisant du «buzz», du bruit, il a provoqué la fureur de ses auteurs et de son lectorat.

Propos recueillis par Pierre Malet

Image de une: manifestation antifasciste en Espagne/ xiquetpansa via Flickr CC

2 commentaires
Merci pour l'information.
Envoyé par Y?ochoua - le Mercredi 24 Février 2010 à 08:12
Tout à fait d'accord pour que l'on n'édite pas un facho non repenti. En revanche, la liberté d'expression doit être maintenue y compris aux Editions la Baleine. D.Daeninckx n'a pas à imposer sa férule sur l'éditeur.Ou alors qu'il crée sa boite ! Sa position genre pensée unique qui se croit originale est contestable et qu'il laisse à d'autres auteurs moins connus et engagés dans d'autres idées de s'implanter à la Baleine. Sinon c'est bel et bien du stalinisme qui n'ose pas dire son nom.
Envoyé par Claude_031 - le Mercredi 24 Février 2010 à 19:24
Membre Juif.org





Dernière mise à jour, il y a 14 minutes