Culture Israël

Né en 1948 à Oran (Algérie), où il passe les premières années de sa vie, il a dix ans lorsqu'il ramasse les tracts de l'OAS au milieu des ruines de l'Algérie des années 60. Il les recueille, les classeavec les contre-tracts, et dit à son frère: « Tu verras, ça, un jour, ça sera de l'histoire !». Ce sens quasi inné, du do­cument et de l'archive ne le quit­tera plus. L’Algérie de son enfance s’était destinée à éveiller en lui un intérêt illimité pour les émissions pirates et les rendez-vous cryptés des ondes autant que pour la Grande Histoire¹.

À quatorze ans, il quitte sa fa­mille pour un voyage de six mois au Pôle Nord, consignant ses aventures par écrit comme il le fera pour l'ensemble de ses ex­périences.

À la naissance de Nouvelles Frontières, il devient guide touristique et multiplie ses périples au cœur des civilisations : il est souvent là où l’Histoire bouge, comme en 1968 au moment du Printemps de Prague.

Il commence une licence d’histoire classique. Gérard Nahon dirige son travail de maîtrise et l'aiguille sur le rabbin Mahir Charleville dont il ne sait rien alors. Il retrouve sa tombe à Versailles, sa descendance, sa généalogie et décide d’étendre sa recherche à un doctorat². Mettant en relief l’importance du Consistoire, il dé­couvre, au cours de ce travail, la néo-orthodoxie consistoriale : un judaïsme français qui garde l'essentiel de sa tradition en col­matant les excès d'une assimila­tion à outrance. Il explique comment ceux qui sont dans cette mouvance, en font la panacée.

Maître de conférences à l'Inalco et à Paris VIII, spécialisé dans l'Histoire des Juifs en terre d'Islam : la réussite de son ensei­gnement aura principalement consisté à former un auditoire riche de sa diversité, vite trans­formé en prétoire de toutes les ré­conciliations.

Membre actif des amitiés judéo-chrétiennes et certainement visionnaire ; il acquiert la conviction que dichotomies et oppositions entre les peuples, ne sont que dialectales. Fort de son im­mersion dans des milieux cul-turels bien distincts, ayant côtoyé Birmans et Peuls, Thaïs et Bé­douins, trouvant amitié auprès de quelque chaman ou pandit, il reste avant tout un homme de terrain soucieux de la Mémoire.

Il est souvent allé tirer l'information au fond de cartons poussiéreux et abandonnés aux rats, dans des sous-sols d'archives qu'il investissait avec la fronde enthousiaste de ceux qui cher­chent et qui, finalement, trouvent.

On reconnaît la marque de l'historien dans sa constante re­cherche du document faisant foi, point de départ de toutes déduc­tions possibles. Il n'aura de cesse de valoriser chacun pour le peuple dont il est issu, la langue qu'il parle ou la coutume qu'il observe, pour le nom de ses parents ou pour la ville de ses ancêtres. Toujours en quête d'indices sur les civilisations, gens et peuples, individus ou collectifs.         C’est    de     son « empathie culturelle » que résultent ses ambitions de voyages et ses travaux. À l'instar d'un couturier, il habillait chacun de ses apparats culturels et dia­prés, le poussant à chercher ses rites, ses traditions et son folk­-lore ; il visait à mettre au jour les spécificités issues des pays du chanvre, de la tulipe, de la rose ou du lys, grâce à ses pérégrina­tions livresques ou de pieds par­courues.

Son départ prorogé nous aurions eu d’autres travaux essentiels. Cris­tallisant ses voyages et ses éva­sions dans un travail universitaire remarquable, il aura défriché et déchiffré les cryptages de nos par­cours et de nos Histoires. Le livre de ses périples s'est re­fermé ce vendredi 30 mai 2008, il s'en est allé, entouré des siens, pour son plus grand voyage.