Deux agents retraités du Mossad ont révélé à CBS’s « 60 Minutes », dans un reportage diffusé dimanche soir, quelques détails sur l’opération de septembre au cours de laquelle des milliers de talkies-walkies et de bipeurs appartenant à des terroristes du Hezbollah ont explosé.
L’opération, qui a duré des années, a transformé en arme des appareils de tous les jours que les membres du Hezbollah utilisaient régulièrement. « Le talkie-walkie était une arme, tout comme une balle, un missile ou un mortier », a déclaré Michael, l’un des deux agents qui ont parlé anonymement à la correspondante de « 60 Minutes », Lesley Stahl.
Le Mossad a commencé à concevoir les talkies-walkies explosifs il y a plus de dix ans. Les appareils, fabriqués dans une installation du Mossad en Israël, étaient équipés de batteries contenant des mécanismes explosifs. Conçus pour se glisser dans les poches de poitrine des gilets tactiques, ces talkies-walkies étaient vendus en secret au Hezbollah par l’intermédiaire de sociétés écrans se faisant passer pour des fournisseurs légitimes.
Selon Michael, le Hezbollah a acheté sans le savoir plus de 16 000 de ces appareils, qui ont ensuite été utilisés contre lui le 18 septembre. « Ils ont obtenu un bon prix », a ajouté Michael, expliquant que le prix avait été soigneusement calibré pour éviter d’éveiller les soupçons.
En 2022, le Mossad a réorienté son attention vers les téléavertisseurs, des appareils que les terroristes du Hezbollah portaient en permanence sur eux. L’ancien agent du Mossad Gabriel, qui a également parlé à « 60 Minutes » sous couvert d’anonymat, a révélé que l’agence avait découvert que le Hezbollah s’approvisionnait en téléavertisseurs auprès de Gold Apollo, une société taïwanaise.
Le Mossad a profité de cette occasion pour concevoir des téléavertisseurs piégés qui pouvaient discrètement nuire à leurs cibles.
Les téléavertisseurs ont été construits plus grands que les modèles classiques pour accueillir des explosifs. Le Mossad a effectué des tests approfondis pour calibrer les appareils, en s’assurant qu’ils ne blesseraient que la personne ciblée sans blesser les passants à proximité.
« Nous testons tout, trois fois, deux fois, plusieurs fois afin de nous assurer qu’il y a un minimum de dégâts », a souligné Gabriel.
Malgré le scepticisme initial du directeur du Mossad, David Barnea, quant à la taille du téléavertisseur, Gabriel a convaincu ses supérieurs de son efficacité.
De fausses publicités et des témoignages en ligne ont présenté les téléavertisseurs comme robustes, résistants à la poussière, à l’eau et durables, ce qui les rendait très attrayants pour les terroristes du Hezbollah. En septembre 2024, le Hezbollah avait distribué sans le savoir environ 5 000 de ces téléavertisseurs à ses membres.
Le Mossad a activé les téléavertisseurs piégés le 17 septembre, créant le chaos à travers le Liban alors que les explosions ont blessé des milliers de terroristes du Hezbollah.
« Un jour après l’explosion des téléavertisseurs, les gens avaient peur d’allumer les climatiseurs au Liban parce qu’ils avaient peur qu’ils explosent », a raconté Michael.
Le lendemain, le Mossad a activé les talkies-walkies, dont beaucoup ont explosé pendant les funérailles des personnes tuées dans les explosions de téléavertisseurs.
« Le but du complot des talkies-walkies et des téléavertisseurs n’était pas de tuer des gens », a expliqué Gabriel. « S’il est simplement mort, alors il est mort. Mais s’il est blessé, il faut l’emmener à l’hôpital, prendre soin de lui. Il faut investir de l’argent et des efforts. Et ces gens sans mains ni yeux sont la preuve vivante, marchant au Liban, que « ne nous embêtez pas ». »
Le coup psychologique et logistique porté au Hezbollah a été significatif. Deux jours après les attaques, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a prononcé un discours modéré que Gabriel a décrit comme reflétant la défaite.
« Si vous regardez ses yeux, il était vaincu. Il avait déjà perdu la guerre. Et ses soldats l’ont regardé pendant ce discours. Et ils ont vu un leader brisé. « Je ne sais pas si vous savez que Nasrallah, quand nous avons lancé l'opération de bip, juste à côté de lui dans le bunker, plusieurs personnes avaient un bip qui recevait le message. Et de ses propres yeux, il les a vus s'effondrer », a déclaré Gabriel.
Les attaques ont ouvert la voie à l'intensification des frappes israéliennes, qui ont abouti à l'élimination de Nasrallah lui-même.
« Ce fut le point de bascule de la guerre », a conclu Gabriel.
