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![]() Ce que Abbas vient chercher en France
Dans un entretien dans le Journal du dimanche du samedi 20 février, le ministre français des affaires étrangères Bernard Kouchner, a plaidé pour la création d'un Etat palestinien. Le chef de la diplomatie française s'est dit «tenté» par «une reconnaissance immédiate par la communauté internationale, avant même la négociation sur les frontières». «Je ne suis pas sûr d’être suivi, ni même d’avoir raison», a-t-il toutefois tempéré. Coincidence, le président palestinien Mahmoud Abbas se rend en France les 21 et 22 février après plusieurs voyages à travers le monde. Cette visite fait partie d'une tournée diplomatique tout azimut qui, après le Japon et la Corée du Sud, le conduira en Inde, au Pakistan, au Qatar et à Oman. Il exploite en fait, pour faire avancer ses pions, l'incurie de la diplomatie israélienne et l'absence sur les théâtres internationaux du ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman, consigné dans son bureau par décision des Américains et des Européens. Les Israéliens estiment cependant que la stratégie du chef de l'Autorité palestinienne n'est pas claire, «brouillonne» même. Elle n'est pas claire parce qu'elle ne s'appuie sur aucun programme politique élaboré, sur aucune proposition bien définie ou sur aucun acte tangible. Les chantres de la gauche sont d'ailleurs eux-mêmes déroutés parce qu'ils ne comprennent plus la stratégie palestinienne. De l'audaceLes atermoiements de la politique de Barack Obama n'ont pas permis à Mahmoud Abbas de montrer de l'audace sauf à placer les Occidentaux dans l'embarras à l'occasion des menaces non voilées liées à la proclamation unilatérale d'un Etat palestinien. La diplomatie suédoise, qui présidait l'UE, et Javier Solana ont refusé d'accéder à cette demande. Le ministre suédois des Affaires étrangères, Carl Bildt avait déclaré: "Je ne pense pas que nous en soyons là. J'aimerais que nous soyons en mesure de reconnaître un Etat palestinien mais il faudrait d'abord qu'il y en ait un, donc je pense que c'est quelque peu prématuré." Alors les Israéliens, réconfortés dans leur stratégie d'inaction, usent de stratagème pour faire diversion en relançant l'idée d'une paix séparée avec les Syriens ou en menaçant l'Iran d'une frappe sur ses installations nucléaires. Il ne semble pas que Mahmoud Abbas vienne à Paris pour annoncer une politique originale, d'autant plus que les relations avec ses ennemis du Hamas sont au point mort. Le programme officiel de la visite stipule qu'il a seulement l'intention de discuter avec le président Sarkozy de la relance du processus de paix: «Le but de cette visite est d'informer les dirigeants français des derniers développements dans la région et nous solliciterons le soutien du président Sarkozy pour les discussions avec Israël afin de parvenir à un accord sur les frontières palestiniennes.» En marche vers le Grand IsraëlRien de nouveau donc dans cette dialectique, sinon qu'elle satisfait la droite nationaliste israélienne qui se réjouit de l'abandon progressif du principe de «deux Etats pour deux peuples». L'absence de négociations les conforte dans leur vision du Grand Israël et plonge les tenants israéliens de la paix dans le grand désarroi. L'ancien ambassadeur Nessim Zvili nous faisait part de ses inquiétudes de voir son pays s'orienter progressivement vers un Etat binational qui perdrait définitivement son identité juive originelle. Nicolas Sarkozy a déjà reçu par trois fois le président palestinien et, à chaque fois, il lui a rappelé qu'il ne «transigerait jamais avec la sécurité d'Israël», une certaine manière de faire comprendre aux Palestiniens qu'ils ont intérêt à négocier sans conditions la création d'un Etat viable, indépendant et démocratique. Il avait marqué ses regrets pour l'échec notable de l'Union pour la Méditerranée due à l'intransigeance de certains pays arabes qui refusaient de siéger aux côtés d'Israël. Il était persuadé que cette union aurait pu jouer un rôle non négligeable d'intermédiaire dans les discussions avec les Israéliens et aurait pu se substituer aux Américains défaillants. L'Union pour la Méditerranée prônait «la paix par l'économie» chère à son ami Netanyahou. Alors, il insistera sur «l'importance de l'unité palestinienne» qui conditionne l'avance vers la paix, car aucun progrès n'a été réalisé dans ce domaine depuis le dernier voyage de septembre 2009. Illusions américainesMahmoud Abbas s'en remet à nouveau à l'Europe parce qu'il semble désenchanté par les résultats médiocres enregistrés par Barack Obama après une année diplomatique évanescente. Il s'est trouvé enfermé dans ses illusions après avoir cru aux espoirs qu'avait générés l'arrivée d'un nouveau locataire à la Maison Blanche. Il a constaté que le président américain était revenu aux fondamentaux, c'est-à-dire à la lutte contre le terrorisme dans le cadre d'un pragmatisme non innovant. Mahmoud Abbas ne croit plus à la crédibilité des américains qui n'osent pas imposer par la force le gel total des implantations de Cisjordanie. Il met sur le compte du manque d'expérience de Barack Obama l'explication de son comportement faible vis-à-vis d'Israël. Que peut-il venir chercher en France? S'il le fallait, la France serait prête comme en 2007 à accueillir une nouvelle conférence des donateurs à Paris «à condition qu'il y ait eu des avancées sur le plan politique». Mais le président palestinien n'est pas demandeur sur le plan économique car la situation s'est complètement améliorée avec un taux de croissance de 8% en Cisjordanie. Le chômage a baissé et la situation de ni-guerre ni-paix lui permet de recevoir tous les mois de la part du Trésor israélien près de 60 millions d'euros correspondant aux taxes prélevées à la source. Les Européens l'aident par ailleurs sur des projets concrets comme la création d'usines électriques palestiniennes pour tendre vers une indépendance énergique vis-à-vis de leur voisin. Par ailleurs, la France cofinance la création, au sud de Bethlehem, d'une zone industrielle de 300 km2 devant attirer de nouvelles entreprises et de nouveaux capitaux pour créer de nouveaux emplois. Trois axes stratégiquesMahmoud Abbas vient donc chercher auprès du président français des conseils sur la nouvelle stratégie à suivre. S'il veut obtenir des résultats féconds, il devra prouver que sa politique a évolué sur trois axes principaux. Sachant que les Américains n'abandonneront jamais leurs alliés juifs, les Palestiniens devront mettre au pied du mur les Israéliens. Ils devront pour cela renoncer à imposer immédiatement le gel complet des colonies, car il existe un consensus général en Israël, aussi bien à droite qu'à gauche, stipulant que seul un accord final pourra se prononcer sur la question. Mahmoud Abbas ne peut plus se cantonner dans une position stérile de refus du dialogue, même s'il est bridé en cela par les dirigeants du Hamas. Ilan Greilsammer, professeur de Sciences politiques et l'un des fondateurs de La Paix maintenant, a dit son amertume le 13 février, à la conférence d'Herzlia: "Je pense que les Palestiniens font une erreur en ne venant pas à la table des négociations avec leurs demandes légitimes. Ils seraient soutenus par les Etats-Unis et les Européens et ils auraient tout à gagner. A l'heure actuelle, la droite israélienne se réjouit de cette situation et donne le sentiment que son intérêt est de ne rien faire. On peut expliquer l'attitude des Palestiniens par le fait que le Hamas se trouve derrière eux et qu'ils ont peur de perdre leur position dans le cadre de négociations avec Israël." Le président de l'Autorité devra ensuite intégrer l'idée que Barack Obama est moins sensibilisé au conflit israélo-palestinien qu'aux guerres d'Afghanistan et d'Irak, objectifs prioritaires pour lui, parce qu'elles conditionnent l'avenir des Etats-Unis en tant que puissance mondiale. De ce point de vue, le président américain suit rigoureusement les traces de son prédécesseur sans innover, mais en y ajoutant une certaine dose d'incertitude, sinon de désintéressement. Il se borne à émettre des principes généraux sous forme de déclarations contradictoires langue de bois car il ne peut évaluer à leurs justes mesures les risques à prendre dans ce domaine. Mahmoud Abbas doit donc comprendre qu'il ne peut compter que sur sa propre stratégie et que les Occidentaux attendent de lui qu'il agisse concrètement avant de le soutenir face à Israël. Nicolas Sarkozy l'éclairera enfin sur les changements profonds intervenus dans la région. Les pays dits «modérés» comme l'Egypte, l'Arabie saoudite ou la Jordanie sont devenus complètement hors-jeu et ne peuvent plus tenir le rôle d'intermédiaires américains. Ils ne sont plus en état de peser sur les décisions régionales parce qu'ils ont été relayés par l'Iran, la Syrie et depuis quelque temps par la Turquie qui a négocié brutalement un tournant pro-arabe. Ces pays ne sont pas particulièrement pro-palestiniens et ne souhaitent pas s'immiscer dans les querelles internes palestiniennes de crainte de faire le mauvais choix entre le Fatah et le Hamas. Mahmoud Abbas doit donc comprendre que les marges de manœuvre sont limitées et qu'à force d'attendre, il finira par convaincre le monde occidental qu'il ne peut y avoir de paix véritable dans la région. Il doit donc faire preuve de courage politique en prenant des initiatives allant à contre-courant de ses décisions actuelles. Les conseils de Nicolas Sarkozy sur la méthode pour se renouveler seront, de ce point de vue, d'un immense intérêt. Jacques Benillouche www.slate.fr Juif.org
Yerouchalmi
Kountrass
Bivouac-ID
2 commentaires
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Tout a été dit ou presque dans cet excellent article. Comme toujours l'incertitude et le désarroi prévaut chez nos voisins palestiniens. Ils sont incapables d'avancer dans la voie d'un réglement pacifique et cela depuis plus de 60 ans. Faute de décisions politiques, ils ne peuvent avancer dans cette voie. Il ne veulent ou ne peuvent organiser un consensus pour des décisions constructives. Les intérêts des palestiniens sont flous et contradictoires. Comment dans cette situation demander au seul état d'Israêl de débloquer une situation dont il ne détient pas les clefs? Il faut que le monde et l'opinion mondiale accepte le fait que tout accord est subordonné au bon vouloir de la partie palestinienne et qu'elle finisse de se cantonner à des a priori qui ne sont en fait que l'affirmation du désir de supprimer l'interlocuteur avec lequel ils sont censés rechercher la paix. C'est une histoire de fous que l'on voudrait attribuer à des gens saints d'esprit. Rechercher à imposer aux seules israéliens une solution imposée, c'est tout simplement vouloir essayer de le faire disparaitre sans tambours ni trompettes. On comprend mieux les hésitations du monde occidental à se lancer dans pareille aventure.
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