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Communauté Juive

Rencontre avec le Rav Benny Lau

8 Juillet 2008 - Le Ptit Hebdo

Rencontre avec le Rav Benny Lau

Le rav Benny Lau dirige la communauté Ramban à Jérusalem et le Beth Morasha, centre d’étude destiné aux étudiants.

Nombreux de vos articles traitent du monde orthodoxe…

C’est un sujet très problématique et récemment on m’a demandé pourquoi, face à tous les problèmes rencontrés avec les religieux, ne pas séparer la religion de l’Etat ; c’est une question qui revient sans cesse, chez un public en majorité favorable et attaché au judaïsme. Ce public est cependant rebuté par l’hostilité du système religieux, par exemple lorsqu’il souhaite des services de mariage, de divorce, de conversion, de casherout, de shmita… Le problème n’est pas la religion, mais les services du rabbinat. Tout juif laïc, intelligent, se pose la question à savoir pourquoi ne pas séparer politique et religion.

Et qu’en pensez-vous?

Je crois que si l'on proposait un système plus avenant, plus délicat, personne n’irait se marier à Chypre, si le Beth Din était plus juste et moins hostile. Il suffirait de manifester une écoute chaleureuse, de l’ouverture, de la compréhension, un système bon et sérieux. Aujourd’hui les institutions nationales sont contrôlées par des partis orthodoxes qui n’ont aucune préoccupation sioniste. Un couple laïc qu’on envoie étudier les lois de pureté familiale, et où on traite la fille de pêcheuse, s’enfuira à Chypre en courant. Tandis que s'ils étaient reçus avec amour, respect et tolérance ils se rapprocheraient du judaïsme. Mais le système rabbinique en Israël, et ceci est un fait, repousse les israéliens, au lieu de les rapprocher de la religion.

A qui en voulez-vous le plus alors, aux orthodoxes ou aux politiciens?

Aux politiciens bien sûr, les orthodoxes ne font que jouir de ce qu'on leur donne. Près de 200 rabbins de yéshivot et de synagogues de tout le pays, ayant servi dans l’armée, sont venus lors d'un rassemblement, il y a quelques semaines. Nous voulons sauver la Torah des mains du rabbinat orthodoxe, nous sommes pour une Torah unie, pour tous.

Vous pensez à une action concrète?

Mais nous avons déjà commencé, nous avons déposé un recours en justice contre le grand rabbinat. Le problème de la Shmita est terrible et la décision qui a été prise signifie une catastrophe pour l'agriculture israélienne, nous ne pouvons pas permettre cela. Le gouvernement a finalement obligé le rabbinat à accepter le'' hétèr méh'ira''.

Vous êtes plus proche des laïcs que des religieux, il semblerait…

Il faut préciser que je suis très proche du rav Ovadia Yossef, un harédi, or, que ce soit pour le hétèr méhira, les conversions ou les tribunaux rabbiniques, il est d'accord avec nous pour tout.

Shass n'est pas harédi à l'origine, ''harédi'' est une notion ashkénaze, Shass est le mouvement des juifs d'Afrique du Nord, qui ne sont que des juifs qui aiment Israël et sont fidèles à la Torah. Je n'ai nul besoin de Bné Akiba ni de rav Kook, je veux des juifs qui se définissent par "je vis dans ce pays, j'ai des devoirs envers le peuple d'Israël", et non "j'appartiens à tel secteur, comme les haredim" peu m'importe ashkénaze, sépharade, haredi ou dati leoumi…

Une fois, on a demandé au rav Messas lors d'une émission télévisée, s'il récitait le Hallel (louanges) pour Yom Haatsmaout. "C'est une question d'ashkénaze, a-t-il répondu, chez nous, nous ne nous posons pas tant de questions: Dieu nous a donné, nous le remercions!" Quel charmant homme! Pourquoi entrer dans de telles considérations; le rav Obadia Yossef est un juif à qui il importe du sort du peuple juif, cela suffit, là où il est sollicité nous le trouvons; je n'ai pas besoin d'un Rav à kippa srouga, le titre de notre mouvement est "je suis responsable de mon peuple", et je ne pense pas que les lithuaniens le soient vraiment.

Vous trouvez aussi que les lithuaniens méprisent les sépharades?

Ils méprisent tout autant les religieux sionistes. Je parle aussi avec le Rav Amar; tout le système éducatif est lithuanien et les yeshivot ne reçoivent pas facilement de jeunes sépharades, or les parents s'inquiètent que leurs enfants ne soient pas acceptés; ceci aussi est un problème.

Et qu'en est-il des partis Shass et Mafdal?

Il y a bien sûr un grand fossé – mais il faut unir les forces – il faut changer cette image de séparation entre orthodoxe, laïc et sioniste religieux; tout celui qui est engagé et éprouve une responsabilité envers le peuple juif appartient à notre mouvement.

Engagement notamment militaire, donc cela exclut déjà les orthodoxes…

Non, nombreux sont ceux qui font l'armée, le rav Ovadia Yossef enjoint fortement les étudiants de yéshiva qui ne manifestent pas de fortes capacités d'étude à s'engager, et son propre neveu a récemment été récompensé pour l'excellence de son service. Le rav Ovadia Yossef considère que quiconque vit dans ce pays doit s'engager, et celui qui étudie la Torah aide aussi Israël de cette manière. Dans ses synagogues on récite la prière pour les soldats et pour la paix de l'Etat; aucune synagogue lithuanienne ne le fait malheureusement; le rav Ovadia Yossef est parfaitement sioniste, c'est une médisance de dire le contraire. Il adore Israël.

Nous sommes,à l'heure de cet entretien, à la parasha de Korah, avez-vous un commentaire d'actualité?

Qu'est-ce qu'une discorde qui est ou non leshem shamayim? Prenons l'exemple du problème des conversions: 300 000 personnes dont le destin est lié à Israël, soit par un mariage, soit autrement, qui ne sont pas juifs selon la halaha, n'avons-nous pas une responsabilité envers eux? Ne doit-on pas essayer de les aider? Voici une discorde leshem shamayim, on peut en discuter et se disputer, mais leur fermer la porte au nez et les rejeter, sans essayer de les convertir, c'est intolérable!

Est-ce ce qui a été décidé, ils vont être refoulés?

C'est ce que le rabbinat souhaite, mais nous ne les laisserons pas faire, nous avons une responsabilité, Dieu souhaite que nous nous en occupions.

Mais la lutte sera difficile, ils sont très fermes…

C'est exact, mais la rigidité de Beth Shamay laisse finalement le droit à la tolérance de Beth Hillel, auquel nous appartenons tous. Une discorde leshem shamayim trouve toujours une solution à la fin. Nous n'abandonnerons pas ces personnes, nous en avons la responsabilité.

Etes-vous en contact avec la communauté francophone?

Non, pas particulièrement.

Nous avons eu l'honneur d'interviewer pour le Ptit Hebdo votre père Naftali et votre oncle Rav Israël LAU Grand Rabbin de Tel Aviv. Que pense votre oncle de votre engagement?

Je pense et j'espère qu'il est fier de moi tout comme je suis fier de lui ; nous nous apprécions beaucoup, c'est un homme dont le cœur est tourné vers Israël. Je me souviens que quand j'étais enfant, il se rendait dans les bases militaires le soir du Seder.

Que pensez-vous des mouvements réformistes?

Ils sont minoritaires, la majorité des israéliens préfèrent la tradition authentique. Vous souvenez-vous des manifestations d'orthodoxes sur la rue Bar Ilan; à l'époque le rav Bakchi Doron avait déclaré qu'il était interdit de bloquer les routes parce que de nombreux juifs l'empruntaient justement pour aller manger le repas du shabbat en famille, et que de la sorte, ils accomplissaient malgré tout la mitsva de "Souviens-toi du jour du shabbat", même si pour cela, ils transgressaient d'autres commandements. C'est extraordinaire, non ? Alors, le rav Bakchi n'est-il pas un juif casher ?

Hilloula du Rabbi de Loubavitch

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