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Politique Israël

Rencontre avec Uzi Landau, membre de la Knesset

30 Janvier 2008 - Avraham Azoulay [Le Ptit Hebdo / Juif.org]

Rencontre avec Uzi Landau, membre de la Knesset

Avraham Azoulay/Juif.org: La parasha mishpatim traite de justice, je vous ai entendu parler à la Knesset il y a quelques semaines, vous êtes particulièrement sensible à la justice sociale et notamment au cas des expulsés du Gush Katif…

Uzi Landau: Voilà déjà 3 ans depuis, et des milliers de personnes n'ont toujours pas de logement fixe, voire temporaire, pas retrouvé de travail, certains ont perdu des affaires florissantes où ils avaient tout investi, des familles sont détruites, les enfants ont des troubles psychologiques; ce n'est même plus une question de droite ou de gauche, mais un problème humain! Au niveau émotionnel, si on regarde dans un miroir l'image d'Israël, tout semble détruit, en pratique le pays ne fait rien de concret, en matière de respect humain, c'est une grande honte ce qui se passe, où sont tous ceux qui ont encouragé le retrait, cette élite, les écrivains, les intellectuels – où sont ils maintenant ces hommes d'esprit?

Un camp qui déclare être éclairé, évolué et sensible aux droits de l'homme tourne le dos à cette souffrance et je demande moi, à la cour suprême que comptent-ils faire?

En 1983, le comité pour Sabra et Shatila a sanctionné très sévèrement l'Etat d'Israël, ils ont blâmé des notables, des ministres, Sharon a été destitué du ministère de la sécurité, car ils ont fait preuve de négligence – ils auraient dû prévoir que les Falangas agiraient de la sorte, c'est pourquoi ils durent assumer leur responsabilité! Là lorsque les juges ont préparé le retrait du Goush, ils savaient pertinemment qu'1 an était loin de suffire à fournir une solution et même 2, pourtant que font-ils pour y remédier,

Où est la responsabilité du juge Barak? Il y a là une grande déficience du système judiciaire…

Avraham Azoulay/Juif.org: Alors à qui revient la responsabilité à présent? Qui va changer quoi?

Uzi Landau: Il ne s agit pas de politique, ni de droite ou gauche mais de cœur juif, de pure sensibilité envers les plus faibles et ceux qui souffrent, depuis plusieurs années nous n'en finissons pas de voir dans ce pays un manque de responsabilité: les expulsés abandonnés, les gens du Nord, lors de la guerre du Liban 2, sous les katioushot à Sderot depuis des mois, est-ce que ça importe à quelqu'un? A-t-on ordonné à Tsahal de faire cesser les katioushot qui tombaient pendant plus d'un mois sur Haïfa?

Finalement, le message que nous émettons au monde est que nous avons peur de nous occuper de ce problème.

Avraham Azoulay/Juif.org: Que pensez vous justement, de la situation à Gaza?

Uzi Landau: Les habitants de Gaza ont élu le Hamas en libre élection, et ce fut une grande victoire pour eux. Les terroristes tirent depuis les cours d'écoles et des maisons et les gazaouites applaudissent – personne ne se plaint ou ne s'oppose aux Katioushot parmi eux – ils ont choisi cette situation.

Avraham Azoulay/Juif.org : Mais les innocents parmi eux? Les enfants qui souffrent de la faim et du froid, sans électricité….

Uzi Landau: Quelle innocence peut-on voir là, il y en a bien sûr, parmi eux des innocents, mais toute la société locale soutient le Hamas, alors quels innocents?

En Iran aussi les sanctions touchent des innocents, et personne ne les mentionne, la Lybie, ou Cuba ont subi des années de sanctions qui ont également atteint bien des innocents, et personne n'a rien dit, car c'est ainsi, on sanctionne ceux qui nuisent et contreviennent à la sécurité. A Gaza ils sont prévenus, ils peuvent partir s'ils veulent. En fait, comme Israël ne réagit pas suffisamment pour stopper les attaques, elles deviennent légitimes, c'est normal de se faire bombarder de katioushot…

Avraham Azoulay/Juif.org: Et pourtant, qu'avait promis Sharon?

Uzi Landau Sharon avait dit "notre sécurité sera meilleure, il y aura moins de terrorisme et s'il y en a, il sera plus facile de s'en occuper", quant à Mofaz je crois, il a dit "Si on touche à Sderot, Gaza tremblera et le monde comprendra!" On voit bien, en effet… Sderot croule sous les katiouchas et le terrorisme continue et se développe … c'est plus qu'un problème de politique, c'est une crise bien plus profonde qui touche tout le pays, y compris les élites de l'académie, des médias ou de l'éducation…

Avraham Azoulay/Juif.org: A propos d'éducation, que pensez vous de la grève qui a paralysé le système si longtemps, combien de temps peut-on tolérer une telle situation bloquée de la sorte sans intervenir, en tant qu'ancien ministre, qu'en dites vous?

Uzi Landau votre question touche un point sensible, c'est un symptôme bien profond dans l'éducation que l'on retrouve moins dans le public que dans l'établissement: nous perdons de plus en plus le sentiment juif sioniste authentique. Par exemple, depuis Oslo, à chaque fois que nous avons à surmonter des attaques, à la dernière minute, nous faisons machine arrière. A l'exception de l'opération Homat Magen, A Oslo, et après des années de lutte contre le terrorisme, Israël fait des concessions énormes sans précedents: les accords de Gaza et Jéricho, la fuite du Liban, la Feuille de Route, les échanges de criminels contre terroristes comme l'affaire Tanenbaum, le retrait de Gush Katif, la guerre du Liban 2 et maintenant Sderot. Toutes ces 15 dernières années, Israël rétrocède face au terrorisme. Forts, nous ne le sommes qu'en paroles. Ces rétrocessions successives, ne sont pas que géographiques, elles sont mentales, elles sont la rétrocession des principes essentiels du judaïsme et du sionisme; à savoir, tenir et ne pas renoncer à ce qui nous revient de droit, de tout temps; du temps de Begin ou de Ben Gurion, de telles choses n'auraient jamais été tolérées, sans rapport avec la droite ou la gauche, c'est anorm!l

Si on considère les écoles, combien d'écoles enseignent le judaïsme, le sionisme? Le dernier ministre de l'éducation permet d'étudier la makwa, la tragédie des palestiniens, qui en 48 nous ont épargné, et dont la majorité a fuit c'est la catastrophe. Est-ce légitime, Ce qui arrive chez nous c'est que 50% des soldats n'ont jamais été à Jérusalem et 80% n'ont jamais été au kottel et 26% ne font pas le service militaire et d'autres 17% quittent l'armée après leur incorporation, c'est la grande crise dont il est question, qui brise la solidarité sociale et nationale, et ceux qui prennent les décisions quant à Sderot, nous voulons voir Israël revenir à ses racines juives et sionistes, et clamer, sans bégayer, à l'image de Begin et de Ben Gourion qui ne craignaient pas de dire leur fierté d'être sioniste et dire "oui je suis sioniste et j'en 3uis fièr!". Le sionisme est l'entreprise la plus importante de justice historique de ce siècle, j'ignore depuis quand il n'y a eu entreprise si humaine, si juste, si élevée. Bien sûr que je suis sioniste, ce pays, c'est le notre. Juste à nous. Et personne d'autre.

Les arabes ont tous les droits du pays, mais aucun droit sur le pays.

Il faut le dire haut et fort sans bégayer. Nous des colonisateurs? Les arabes sont venus du désert et se sont octroyés des droits de propriétaires. Comme en France, les Islamistes qui se comportent comme si la France leur appartenait…

Avraham Azoulay/Juif.org; Oui mais Nicolas Sarkozi est sévère…

Uzi Landau: Barouh Ashem (ter)

Il y a des droits ici aussi pour toutes les minorités, mais aussi des devoirs. Les arabes doivent comprendre que s'ils veulent vivre ici, ils doivent respecter la loi et être fidèle à l'Etat d'Israël, un état juif et sioniste, c'est la base à exiger, sans honte et sans s'excuser…

Avraham Azoulay/Juif.org: Aujourd'hui vous ne faites plus partie du gouvernement, mais êtes vous engagé dans une action ou un projet politique?

Uzi Landau:Je n'appartiens plus à la Knesset et je ne fais plus de politique, mais effectivement je suis toujours engagé au niveau sioniste, avec un nouveau projet…

Avraham Azoulay/Juif.org: Un projet excellent, dit-on…

Uzi Landau:Par ce projet nous visons à atteindre un public non religieux, mais un public plutôt centriste, un public qui est perturbé par toutes les déclarations du genre "nous sommes des colonisateurs, les palestiniens sont nos victimes et cette terre est aussi la leur, et nous en avons fait des réfugiés etc…

Avraham Azoulay/Juif.org: Alors pourquoi se tourner vers ce public?

Uzi Landau: Nous avons besoin de renouveau. A nouveau montrer à la majorité la profondeur de nos racines dans ce pays…

Avraham Azoulay/Juif.org: Seriez vous Rabbin?

Uzi Landau: Nul besoin d'être rabbin! Jabotinski était-il rabbin? Et Hertzl? Et même Moïse a vécu parmi les goyim 60 ans durant, chez les Egyptiens. Mais lorsqu'il a compris qu'il se passait quelque chose d'anormal avec ses frères, en tant que Juif se respectant, il a été sensible à la souffrance de son peuple, et quand il vit un Egyptien frapper un Hébreu, il n'a pas hésité à le supprimer. Il fut vu par des juifs mécréants qui l'accusèrent, ce à quoi il répliqua qu'il ne faisait que rendre justice à ses frères; l'un d'eux lui dit "qui es tu pour agir ainsi?" et selon le midrash il répondit "le prince? d'Egypte" Il se peut que quand on est à l'extérieur du peuple Juif, on voit les choses avec une perspective différente et on réalise que ce qui se passe est absolument anormal, les comportements irrespectueux souvent, et la grande catastrophe dans ce pays, c'est si nous sommes sortis d'exil, au regard du gouvernement actuel, l'exil n'est pas vraiment sorti de nous (n.d.t: inspiré par R. Menahem Mendel de Kotzk).

Avraham Azoulay/Juif.org: vous semblez en colère, amer?

Uzi Landau: Je suis très en colère

Avraham Azoulay/Juif.org: êtes-vous frustré par la situation politique? De ne pas savoir comment agir? Qui à votre avis peut vraiment exercer une influence? Les hommes politiques?

Uzi Landau: Ouiiii… si j'avais voulu j'aurai pu reprendre mes fonctions après la démission de Dany Nabet…

Avraham Azoulay/Juif.org: ou de Charansky, et pourquoi ne pas l'avoir fait?

UL: Parce que je pense notamment que cela m'aurait empêché de participer pleinement au projet Eretz Nehederet…

Avraham Azoulay/Juif.org: cela demande beaucoup de temps?

UL: énormément et surtout, si on est au gouvernement, chacun de nos actes sont commentés; on est accusé de tirer profit de la situation, je ne veux pas leur devoir de comptes, les formalités de l'association suffisent.

Avraham Azoulay/Juif.org: Etes vous toujours au Likoud?

UL: non je ne suis pas actif, mais je suis membre du parti.

Avraham Azoulay/Juif.org Savez vous que Bibi et d'autres membres du Likoud sont venus à Har Homa, où je vis, pour soutenir la population et Ruby Rivlin notamment, s'il se présente aux prochaines élections et vous propose de revenir, ne seriez vous pas tenté?

UL: commencez par lui demander à lui… La Knesset, j'ai assez donné je pense en 22 ans, finalement tout se résume à l'influence qu'on peut exercer ou non. Si je pensais pouvoir influer de manière consistante sur le gouvernement, ce serait une bonne raison d'y revenir, mais si c'est juste pour être un parlementaire ou un ministre de plus – dont je respecte formellement le travail, mais si je ne trouve pas personnellement que je peux être vraiment influant, je préfère céder la place à des jeunes…

Avraham Azoulay/Juif.org: Mais vous avez l'expérience… et on dit de vous que vous êtes un homme honnête –

UL: Je ne veux pas dire non plus jamais, mais pour l'instant je ne trouve aucune raison d'abandonner mes activités actuelles au profit de la politique.

Avraham Azoulay/Juif.org: Vous êtes aussi très engagé dans la protection de l'environnement et le développement écologique

UL: Absolument, et depuis bien longtemps, je crois même que j'étais le premier parlementaire à demander à faire partie du Conseil de la Société Protectrice de la Nature, en 84-85. Et la législation aussi, la Loi pour la protection des plages, que finalement le Ministère de l'Environnement a adoptée était une initiative à moi, et il fut cosigné par plus de 60 membres de la Knesset, nous étions alors très actifs, en fait le premier ministre de l'environnement était chef du Likoud, Rony Milo, nommé en 88, suite à une discussion que j'avais eue avec Shamir, qui s'est rangé à mon idée.

Avraham Azoulay/Juif.org: Etes vous engagé dans d'autres actions?

UL: Dans quelques unes comme Zikaron Tomeh ou d'autres fondations, mais pas politiquement. Mais déjà le projet Eretz Nehederet m'occupe beaucoup,

Avraham Azoulay/Juif.org: Drôle ce nom, il rappelle celui de l'émission télévisée satirique… c'est intentionnel?

UL: C'est exact, c'est parce que nous nous adressons à un public non religieux, car les religieux n'ont pas besoin d'être convaincus, ils savent déjà l'importance de Sion. Je m'adresse à un public qui recherche des raisons de fierté, qu'ils soient de gauche ou de droite. Je veux qu'ils viennent à Jérusalem, qu'ils voient le Kottel, la ville, son histoire, et aussi le Goush Etsion, et nous organisons même des visites à Sderot, dans le Golan, pour que le peuple rencontre les habitants de ces régions et qu'ils sachent qui ils sont.

Qui connaissait les habitants de Goush Katif avant?

Il ne s'agit pas de politique mais de connaissance profonde de ce que nous défendons, savoir ce que nous risquons de perdre, ce à quoi ils sont prêts à renoncer sans être vraiment certains de prendre la bonne décision. Et si la conclusion qui s'impose c'est de renoncer à Bikat Hayarden, comme à un bras pour sauver le corps, politiquement ça se tient. Mais si c'est transmettre quelque chose qui t'appartient en propre, il ne faut pas renoncer gratuitement. Il faut tenir à sa dignité, à sa foi. Si on se montre faible, au Moyen Orient, personne n'a pitié. Tu ne dois pas renoncer à tes droits et t'excuser, les Palestiniens, eux se comportent comme s'ils étaient vraiment légitimés à le faire, convaincus, et plein de confiance. Ils se battent avant tout pour la justice et nous, où en sommes nous? Loin de ça, c'est pourquoi nous voulons rendre à toute la population le sentiment de justice. Au fait, un groupe de français s'est promené avec nous dans le Goush Etsion à Soukot dernier…

Avraham Azoulay/Juif.org:Leur avez-vous parlé en Français? Vous avez un doctorat, vous avez étudié aux Etats-Unis, il me semble?

UL:J'ai étudié au Technion (Polytechnique) et j'ai poursuivi mon doctorat au MIT aux Etats-Unis. C'est là bas que j'ai connu Bibi Nathanyaou qui est devenu un excellent ami, même si nous ne partageons pas toutes les mêmes vues politiques, de même que je ne suis pas toujours d'accord avec le Likoud.

Avraham Azoulay/Juif.org:Qu'est-ce qui vous a poussé à faire de la politique?

UL:Tout ce qui touche à Israël m'intéresse, déjà depuis le Technion et d'ailleurs, les circonstances dans lesquelles j'ai rencontré Bibi, c'était lors d'une manifestation de soutien à Israël, après la guerre de Kipour, alors qu'une animosité anti-israélienne extrême régnait dans les campus universitaires aux USA; j'y distribuais des tracts. Puis de l'activité publique pour Israël, je suis passé à la politique pour Israël. Déjà quand j'enseignais au Technion, à la veille des élections de 77, nous prenions le bus le soir, pour aller prêcher la révolution dans les quartiers de la ville…

Avraham Azoulay/Juif.org: Et après toutes ces années de pratique, comment voyez vous la politique aujourd'hui?

UL: Je la vois un peu comme la dernière Parasha, Ytro … Je crois qu'aujourd'hui aussi nous devons exiger des hommes de justice et de cœur. Je pense qu'il n'y a pas assez d'individus vraiment honnêtes, qui se posent la question "que puis je vraiment faire pour le pays, pour mon peuple, du plus grand au plus petit…?" Des gens de courage, de vérité, qui craignent Dieu. La situation est difficile, il faut le dire. Il ne faut pas craindre de dire la vérité au peuple. Comme Churchill qui ne craignait pas d'annoncer les difficultés à son peuple.

Avraham Azoulay/Juif.org: Dans ce cas, encouragez-vous la communauté juive de France à faire son Alyah ou non?

UL: Et comment, il faut venir. Venez c'est une grande fierté et un grand mérite d'être israélien et sioniste, et nous souhaitons votre venue! Venez nous renforcer et vous renforcer, venez gagner! A la question "que comptes tu faire contre ce terrorisme qui n'en finit plus?" Churchill répondait "Je n'ai qu'un seul plan: le vaincre à tout prix!". On peut vaincre le terrorisme avec des mesures définitives et non aléatoires comme à Gaza en ce moment, où on coupe et remet l'électricité au petit bonheur…

Avraham Azoulay/Juif.org: Dernière question: vous participez au Congrès de Jérusalem le 19 et 20 février à Jérusalem,, de quoi allez vous parler?

Uzi Landau:D'exactement de ce dont je vous ai parlé maintenant, ce que j'ai dan3 la tête depuis plus de 20 ans…je ne pense pas que d'ici le mois prochain je changerai d'opinion… Venez et vous saurez.

Avraham Azoulay/Juif.org: Est-il important que le public francophone s'y rende?

Uzi Landau: Bien entendu, d'autant plus que c'est une communauté idéaliste qui vient par pur sionisme. Il faut qu'ils viennent, qu'ils participent à la vie sociale et politique du pays, qu'ils s'engagent et qu'ils influent!