Marine Le Pen, invitée de Radio J, a finalement été déprogrammée. Sans rentrer dans les débats qui
peuvent agiter les auditeurs de Radio J et tout en comprenant les raisons qui
poussent la direction de cette radio à ne pas inviter la
représentante d'un parti qui compte encore beaucoup de responsables dont
l'antisémitisme ne fait pas de doute (pour avoir couvert le FN pendant de longues
années, j'ai moi-même été témoin de conversations et de propos sans équivoques de
la part de cadres de ce parti), on peut quand même profiter de cette affaire
pour tenter de tordre le cou à une idée reçue qui semble avoir la vie dure:
celle qui voudrait que ce soient les médias qui font le succès du FN.
Des médias suivistes
Le FN est populaire pour tout un tas
de raisons politiques, sociologiques, et les médias accompagnent cette
popularité, la reflètent plus qu'ils ne la créent en invitant Marine Le Pen par
exemple.
De même les médias n'ont pas fait
non plus les popularités de Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy en 2006-2007, et ils
ne font pas plus leur disgrâce d'aujourd'hui.
Nous ne nous réunissons pas entre
éditorialistes, reporters politiques et patrons de journaux pour décider qui
nous allons porter au pinacle et qui nous allons descendre en flammes.
Le reproche que l'on pourrait nous
faire serait plutôt d'être suivistes d'une opinion qui se forme pour des
raisons politiques et que nous percevons plus ou moins bien.
Ce suivisme amplifie-il des moments
de rejet' On nous accuse alors de nous acharner de pratiquer le lynchage
médiatique. Amplifie-il aussi les moments de popularité? On nous accuse alors
de créer un phénomène médiatique artificiel.
En fait, nous vivons dans l'ère du
capitalisme de la presse, les hebdos font des unes favorables ou défavorables
qui marchent. Si elles marchent c'est bien qu'il y a une popularité ou une
impopularité réelle, du moins une curiosité?
Il est vrai que Marine Le Pen
bénéficie en ce moment d'un traitement de faveur, elle est bien moins
«diabolisée» que son père.
Mais c'est elle qui dé-diabolise le
FN. Marine Le Pen n'aurait sans doute pas eu droit à ces images avantageuses
dans ELLE sans avoir renoncé explicitement aux provocations verbales et à
toutes les lubies néo-révisionnistes de son père.
Pour quel effet'
Elle modère son discours. On peut
penser que c'est du bidon et qu'elle est tout aussi facho que son père, mais
elle, elle dit le contraire, et, pour nous, commentateurs, la sincérité n'est pas une valeur sur laquelle il est très
prudent de s'appuyer dans l'analyse politique. Mieux vaut s'en tenir aux
paroles et aux actes.
Ne plus inviter Marine Le Pen sous
prétexte de la combattre, serait d'abord sortir de notre rôle, mais surtout, ça
n'aurait aucun effet politique assuré.
Pour avoir donc couvert le FN dans les
années 1990, j'ai pu constater qu'il y a eu trois phases dans la médiatisation de ce parti. Premier
temps, Jean-Marie Le Pen, bête médiatique, était invité partout, tout le temps.
Puis journalistes, téléspectateurs et
auditeurs se sont, semble-t-il, lassés. On ne le voyait plus pendant de longs
mois. Enfin, une troisième
phase durant laquelle il était invité, comme les autres, à peu près à hauteur
de ce qu'il représentait.
Eh bien, à chaque période, la presse
était critiquée: «Vous le surévaluez, vous le sous-évaluez ou vous le banalisez»,
nous disait-on.
Ces trois phases ne correspondaient
d'ailleurs pas forcément à des périodes fastes ?ou pas' du FN. Ça n'avait pas
de rapport.
Ce qui peut, peut-être, favoriser le
FN, ce n'est donc pas d'en parler ou de lui donner la parole; ce serait plutôt
de sur-couvrir certains aspects de l'actualité, certains faits divers ou
évènements qui donnent une vision du monde au travers d'un prisme sécuritaire.
Ça reste, certes une responsabilité médiatique, mais d'une toute autre nature'
Thomas Legrand
Mais il faut prendre garde que, comme le rappelle Laurent, je crois, il n'y a pas eu en France une " dévychisation " comparable à la dénazification que l'Allemagne de l'Ouest a connue. Par exemple, aucun compte n' a été demandé au parti communiste de ses compromissions de 1940. Or, si quelques individus ( comme Jean-Pierre Vernant, qui me faisait de son vivant, l'honneur de son amitié ) ont immédiatement refusé l'armistice, Pétain, le Statut des Juifs, etc. et se sont tout de suite jetés dans la Résistance, la direction du parti ( Jacques Duclos et Benoît Frachon - celui-ci connu pour son antisémitisme - et Maurice Thorez ) a cherché un terrain d'entente avec les nazis ( l'un des mots d'ordre des communistes - comme d'ailleurs de leurs frères ennemis trotskystes - était de fraterniser avec les prolétaires allemands qui se trouvaient sous l'uniforme ... ) : la mission confiée par Duclos et Frachon à Denise Ginollin, Maurice Tréand et Robert Foissin est d'obtenir de l'occupant la reparution de " L'Humanité " . Le mémorandum établi à cette fin mentionne le
je t'ai déjà dit ce que j'en pensais, tu fais comme tu veux.
pacifisme des communistes et ne manque pas d'insister lourdement sur la persécution dont ils ont été victimes de la part du " Juif Mandel " ( ipsis verbis ), Mandel ayant été ministre de l'Intérieur du gouvernement Raynaud formé en mai 1940.
Mais il y a mieux ( ou pire ... ) : un homme de l'extrême-droite antisémite et cagoularde des années trente a réussi, sans renier aucune de ses amitiés de ce bord-là, une OPA sur la Gauche et sur la République : ce haut fonctionnaire, décoré de la francisque, du gouvernement de Pétain jusqu'en janvier-février 1943 ( plus de six mois, donc, après la rafle du Vél'd'Hiv' , organisée par René Bousquet auquel il devait conserver une indéfectible amitié ) et jouant encore double jeu jusque vers le mois de mai 1943, est évidemment François Mitterrand.
Chabbat chalom pour toi et ta famille.
shabat shalom a vous tous,vous restez dans ma memoire;